Adaline est un film intéressant à plus d’un titre. Tout d’abord, son casting avait de quoi éveiller la curiosité. Retour au cinéma de Blake Lively, qu’on avait perdu de vue depuis le bien moyen Savages d’Oliver Stone, ainsi que la présence d’un Harrison Ford qu’on retrouvera dans le mondialement attendu Star Wars 7. Sans oublier Ellen Burstyn, inoubliable notamment depuis son rôle dans L’Exorciste, et qu’on a revu récemment dans Interstellar. Ensuite, Adaline peut être fier de son démarrage sur le sol américain, avec plus de treize millions de dollars sur le week-end de sa sortie (du vendredi 24 Avril 2015 au Dimanche 26 avril 2015), pour trois mille copies. En pleine période de trust des blockbusters, on salue la performance. Mais surtout, Adaline fait partie des films que TF1 vidéo met en avant pour le lancement de son offre e-cinéma. Un gage de confiance de la part de ce distributeur important, qui ne peut que nous donner envie de découvrir, et faire découvrir cette œuvre.
Adaline Bowman (Blake Lively) est une belle et jeune femme de 29 ans quand elle est victime d’un accident de la route. Sa voiture s’enfonce dans un lac aux eaux glacées, et sa vie la quitte, inexorablement. Mais, alors que tout espoir avait disparu, un étrange éclair s’abat sur la voiture, et l’énergie se diffuse dans chaque molécule entourant l’impact. Adaline revit, est sauvée d’un destin bien dramatique. L’intervention de ce véritable miracle remonte à huit décennies. Quatre-vingts ans plus tard, Adaline a toujours 29 ans. L’effet secondaire de cette seconde chance est qu’elle a cessé de vieillir, passant les années sans prendre une ride. Afin de protéger son intégrité et ne pas être perçue comme un phénomène de foire, Adaline mène une existence solitaire, fugitive. Même sa propre fille (Ellen Burstyn) doit respecter la décision de sa mère, et garder le silence sur sa véritable identité. Sans attaches ni amours durables, Adaline traverse les époques en se tenant à ce mode de vie. Jusqu’à sa rencontre avec Ellis Jones (Michiel Huisman, remarqué dans Game of Thrones, Orphan Black, Wild ou encore World War Z), qui va tout bouleverser. D’autant plus que le père de Ellis (Harrison Ford, récemment vu dans La Stratégie Ender, Expendables 3) est une ancienne connaissance, voire plus, de la mystérieuse Adaline…
Adaline n’est donc pas seulement une romance, c’est aussi un film romantique qui aborde un sujet appartenant au genre fantastique : la confusion temporelle. Les œuvres abordant des Hommes n’étant pas affectés par le vieillissement sont nombreux, mais pas souvent satisfaisant. On peut citer Time Out, La Ligne Verte ou encore The Man From Earth, même si les plus intéressantes des œuvres traitant de ce sujet ne sont pas destinées au cinéma : Le portrait de Dorian Gray en littérature, et l’excellent Lost Odyssey côté jeux vidéo. Adaline a donc fort à faire pour convaincre, car le thème n’est pas facile à aborder au cinéma, avec toutes les limites qu’imposent cet art, mais s’avère être assez puissant pour nous parler avec force. Car non, ne pas vieillir n’est pas qu’un rêve, ça peut aussi devenir un terrible cauchemar.
Adaline installe son personnage principal rapidement et efficacement. Pas de digressions censées construire le caractère de la belle, le réalisateur Lee Toland Krieger va droit au but et nous expose tout de suite le côté fantastique de son histoire. Non sans un joli sens de l’humour d’ailleurs, en justifiant le miraculeux éclair par des termes scientifiques abracadabrantesques, et invoquant un savoir que l’humanité découvrira en 2020 et des poussières. Une ambiance quasi-féérique se dégage de ces premières minutes, un ton à la fois léger mais dramatique qui réussit à nous embarquer dans l’intrigue. Adaline débute sous les meilleures auspices.
Adaline, après son accident et le miracle de sa survie, doit apprendre à vivre avec ce que le film ne présente jamais comme une bénédiction : la jeunesse éternelle. Oui la belle et fringante blonde a de quoi rendre jaloux tant elle peut compter sur sa beauté et ses connaissances infinies acquises au fil du temps. Mais à quel prix ? Celui de ne pas pouvoir s’attacher, sous peine de voir l’être aimé trépasser et surtout lui survivre. Adaline a peur de voir son existence être hantée par d’innombrables images d’un bonheur passé qui, on le sait, peuvent très vite faire place à des manifestations de nostalgie. Puis viennent les regrets, la mélancolie, et au bout du compte la dépression. Adaline ne veut pas de ça, et on regrette que cette volonté ne soit pas plus fouillée. Pas que le film passe à côté de ce sujet, mais plutôt qu’il le survole et ne l’aborde que partiellement, via une séquence qui manque un peu de puissance. La jeune femme nous fait découvrir cette malédiction de la jeunesse éternelle par le biais de la perte d’un animal, une séquence touchante certes, et typiquement américaine d’ailleurs. On aurait aimé plus d’écho, même si l’ambiance de la scène est suffisamment forte pour bien comprendre le choix d’Adaline, de vivre dans la clandestinité.
Adaline reste avant tout un film romantique, avec une histoire basée sur des rapports amoureux compliqués. Impossibilité de s’attacher et grand amour ne font pas bon ménage, et pourtant rien ne peut contrecarrer le destin quand celui-ci a décidé de se moquer des conventions. Adaline rencontre Ellis, et le film peut alors devenir la bleuette qu’on attendait. Peut-être un peu trop d’ailleurs, tous les passages obligés sont abordés, ou plutôt : la plupart des codes sont respectés. Adaline ne cherche pas à malmener son spectateur, c’est un choix payant pour les fans du genre qui trouveront dans ce film de quoi remplir une belle soirée. Pour les autres, ils pourront parfois rire en coin devant certaines situations typiques du genre, voire certains clichés : le bel homme brun qui sort de sa douche, une serviette sur la taille, le corps encore trempé… C’est certes un poncif, mais on ne peut s’empêcher de se dire que la cible sera conquise.
Adaline jouit d’un rythme efficace, d’un montage qui privilégie l’enchaînement plutôt que le calme que certaines situations auraient pu créer. Même si la plupart des rebondissements sont attendus, la narration est assez efficace pour ne pas créer le désintérêt. C’est une des réussites du film, les presque deux heures s’écoulent très vite. Aucun temps mort, même dans tout le passage chez le père d’Ellis, joué par un Harrison Ford qui, décidément, vieillit très bien. Les rapports se complexifient, Adaline fait alors face aux effets durables qu’ont entraîné ses choix. Le côté romantique d’Adaline rattrape bien le manque de relief de l’intrigue fantastique, qui a tendance à rester superficielle (pour mieux ressentir la douleur infinie d’une vie éternelle, jouez à Lost Odyssey).
Au final, on est surpris par Adaline, par sa qualité formelle et son sérieux dans le traitement romantique. Pour ajouter aux louanges, signalons la performance de David Lanzenberg, le directeur photo du film. Pourtant peu expérimenté côté longs-métrages, il n’avait officié jusqu’ici que sur The Signal. Le résultat est réjouissant, agréable à l’œil, et c’est un vrai plaisir. Adaline confirme, après un Son of a Gun savoureux, la bonne tenue de ce début d’offre e-cinéma chez TF1 vidéo. Tant mieux, car ce marché est voué à grandir…
Lana Del Rey signe une chanson sur la bande originale d’Adaline, retrouvez la chez Madmoizelle.
Blake Lively était enceinte, Non stop people rapporte son expérience sur le plateau d’Adaline.
Pour voir la bande annonce d’Adaline, c’est sur Allociné. Sur le même site, un article vous présentera exhaustivement l’offre e-cinéma de TF1 vidéo.