Critique – Anomalisa

Anomalisa est un projet kickstarter financé à hauteur d’environ 400 000$. Film d’animation atypique, ce financement s’est fait principalement sur le nom des auteurs : Duke Johnson, mais surtout Charlie Kaufman, qui signe le scénario. Notre avis.

Un projet de crowdfunding

Charlie Kaufman n’est en effet pas un inconnu dans le milieu du cinéma. C’est lui qui se trouve derrière les scénarios des étranges et brillants Eternal Sunshine of the Spotless Mind (de Michel Gondry) et Dans la Peau de John Malkovitch (de Spike Jonze). Deux histoires torturées à l’originalité extrêmement créative. De son côté, Duke Johnson est une pointure dans le domaine de l’animation en stop-motion, et c’est à lui que l’on doit la série Marry Shelley’s Frankenhole, ou encore Abed’s Uncontrollable Christmas, l’épisode en stop-motion de la série Community (pour lequel il a gagné l’Annie Award du meilleur réalisateur). Autant dire que lorsque les deux hommes s’associent pour réaliser Anomalisa, qui se présente donc comme un film d’animation avec marionnettes en stop-motion, il y a de quoi être emballé.

Anomalisa est un film d’animation pour adulte

Le film raconte un moment de la vie de Michael Stone, un homme déprimé par la fadeur de la vie. Tout est pareil, les gens sont tous les mêmes, rien n’a de saveur qui sache allumer une quelconque excitation. Se rendant à Cincinnati pour y donner une conférence, il va alors faire la rencontre de Lisa. Originale, naturelle et pleine de vie, elle le fascine immédiatement. Comme si elle était, peut-être, le moyen de reprendre goût à la vie…

Anomalisa parle de dépression, de réalité qui rattrape les espoirs, dans une atmosphère profondément mélancolique. Incontestablement, le film s’adresse aux adultes, tant dans le fond que dans la forme. A titre d’exemple, le tournage avec marionnettes a permis aux auteurs de réaliser une scène de sexe particulièrement réussie, avec nudité frontale (et pas seulement durant une demi-seconde). Le film a en effet une volonté d’être vrai, dans ce qu’il montre et à la façon dont il le fait. Les marionnettes ne sont ainsi pas retouchées numériquement en post-production, comme il est d’usage habituellement. Les coutures sont donc visibles, et participent à un certain malaise, en jouant sur le principe de l’uncanney valley : elles renvoient les marionnettes à leur statut d’objet, alors même qu’elles sont réalistes, animées, et qu’elles vivent littéralement un moment humain. C’est le mal-être de Michael Stone qui s’insinue en nous : tout est mécanique, tous sont des pantins.

Des hauts et des bas

Il y a beaucoup de réussites dans Anomalisa. L’originalité, les choix esthétiques, la métaphore (dépressive) de la vie, de l’amour, sont remarquables (et pas dénués d’humour). Parvenir à ce degré de réalisme à l’aide de poupées est d’ailleurs en soi un tour de force. Pour autant, certains éléments viennent malheureusement ternir l’ensemble. L’écriture des rôles de Michael et Lisa tombe ainsi dans la facilité de l’homme savant et de la femme ingénue un peu idiote, ce qui est assez décevant (même si il faut reconnaître que Michael n’est pas présenté comme un chic type, ce qui atténue cette banalité conservatrice). Anomalisa souffre également de longueurs, de scènes dont on a l’impression qu’elles traînent plus que nécessaire. Et ce n’est pas si surprenant que cela : à l’origine (du moins lors du lancement de la campagne kickstarter), il devait s’agir d’un film de 40 minutes. Les 91 qu’il dure finalement sont particulièrement intéressantes… mais émaillées de défauts et maladresses de rythme.

Un autre avis ?

http://www.lesinrocks.com/cinema/films-a-l-affiche/anomalisa/

Critique - Anomalisa
Anomalisa est une oeuvre singulière, une plongée dans la solitude, l'espoir et la fadeur de la vie. Une prouesse imparfaite, mais mérite largement d'être vue.
Scénario
Acteurs
Mise en scène
Images et son
On aime bien
  • Le ton adulte
  • Le réalisme de l'ensemble (les marionnettes sont aussi expressives que de vrais acteurs !)
  • L'utilisation des voix (en dire plus serait spoiler)
On aime moins
  • L'écriture un peu facile de la relation Michael-Lisa
  • Des longueurs
3.8L'avis
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