Critique – Au delà des montagnes

Jia Zhang Ke continue son triptyque, commencé avec Still of Live et A Touch of Sin, avec Au-delà des montagnes. Voici la critique de cette nouvelle œuvre.

Après les deux formidables Still of Live et A Touch of Sin qui signaient tous les deux un portrait glaçant de la mutation rapide de la Chine contemporaine, Jia Zhang Ke poursuit le tableau de son pays avec Au-delà des montagnes, présenté en mai 2015 au festival de Cannes, qui raconte l’histoire d’une famille en trois tableaux qui se déroulent successivement en 1999, 2014 et 2025 ! Une nouvelle réussite du cinéaste chinois? Voici notre avis.

Go West

C’est sur cette chanson emblématique des années 90 que débute Au delà des montagnes. Un groupe de jeunes gens danse sur cette musique occidentale avec joie et l’espoir d’une société qui s’ouvre. Parmi les danseurs, la caméra se focalise sur un couple : Tao et Liangzhi, deux jeunes de condition modeste. Mais un troisième larron va entrer dans la danse : Zhang, un jeune ambitieux qui symbolise l’immersion de la Chine dans le capitalisme le plus effréné. Ce dernier achète d’ailleurs la mine dans laquelle travaille Liangzhi et lui propose de monter en grade et de devenir son associé à la condition de lui laisser Tao qu’il convoite. Celui-ci refuse et Zhang le licencie sans aucun état d’âme. Tourné en trois parties, Au delà des montagnes concrétise fort bien au fil des épisodes les changements qui bouleversent la Chine dans les transports, l’économie et les mentalités. Mais il dépasse la simple analyse pour se focaliser sur ce trio et raconter une histoire plus personnelle qui promet de donner une dimension supplémentaire au film.

Une histoire intimiste

Tao est partagée entre ces deux prétendants et, sans vraiment décider, peut-être est-elle d’ailleurs séduite davantage par cette promesse de lendemains qui chantent que par Zhang lui-même, elle choisit de l’épouser ce qui provoque le départ de Liangzhi pour une mine du Nord de la Chine. Le film déroule leurs sentiments avec finesse et beaucoup de silences introspectifs superbement servis par des acteurs magnifiques dont la caméra, toujours très proche d’eux comme pour saisir la plus infime de leurs émotions, les enveloppe avec bonheur. Bien entendu, le choc de ces changements qui bouleversent un monde de traditions qui éclate reste présent mais Au delà des montagnes le laisse en arrière-plan. L’essentiel réside dans le cheminement de Tao puis, dans le dernier épisode qui se situe en Australie en 2025, celui de son fils, au prénom révélateur, Dollar (!!), qui, comme comble de son déracinement, prend des cours de chinois et ne peut converser avec son père que par le truchement d’une interprète. Toute une liberté trompeuse qui s’est offerte à eux comme une terre promise au delà des montagnes et qui révèle sa vraie nature : celle d’une cupidité sans limites. Mais le film ne sombre pas dans la noirceur. Tao, superbe de courage et de dignité tout au long du film, nous en délivre la preuve lors de la scène finale merveilleuse de beauté et d’émotions. Un très beau film!

Un autre avis sur Au delà des montagnes: http://www.telerama.fr/cinema/films/au-dela-des-montagnes,500690.php

Critique - Au delà des montagnes
Au delà des montagnes raconte la trajectoire de trois personnages dans la Chine contemporaine mélangeant avec réussite analyse sociale et portrait intimiste.
Histoire
Mise en scène
Acteurs
Images et sons
On aime bien
  • Les acteurs magnifiques
  • La photo impeccable
  • Quelques plans superbes
On aime moins
  • La première partie un peu lente
4.2L'avis
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