Dans le genre adaptation d’épisode biblique, Noé est à mon sens la plus périlleuse à être sortie ces dernières années. Et c’est Darren Aronofsky qui s’en charge. Pour rappel, c’est à Aronofsky que l’on doit Requiem for a Dream, The Wrestler ou encore Black Swan. Du film globalement intéressant, qui donne un aperçu du potentiel que peut présenter cette version de Noé sous sa coupe. Cependant, c’est avec la peur au ventre que je l’ai visionné…
Un bref rappel « apeupréhistorique » s’impose. Après avoir sorti du néant la lumière, la terre, les mers, ainsi que les êtres vivants, le créateur fît Adam et Eve, parents de l’Humanité. Ceux-ci, après avoir été chassé de l’Eden eurent trois enfants : Cain, Abel et Seth. Cain tua son frère Abel, s’enfuit et fonda une civilisation dont la prospérité n’avait d’égal que le vice qui l’avait corrompu. Noé est le petit-fils de Mathuzalem, et le dernier descendant de la lignée de Seth. Cette lignée ne s’est pas égarée telle celle de Caïn et continue de vivre en communion avec la nature. Il vit avec sa famille à l’écart de cette civilisation jusqu’au jour où le créateur lui envoie une vision du déluge qui va s’abattre afin de purifier la Terre des descendants de Caïn. Noé s’emploie alors à bâtir une arche afin de sauver les espèces vivantes de la « grande lessive ».
La réalisation de Noé est globalement au rendez-vous. En s’appuyant notamment sur de bons effets spéciaux, tout est fait pour en mettre plein la gueule, et mettre l’accent sur la fresque biblique de Noé. Du grand spectacle auquel Darren Aronovsky apporte une réflexion philosophique sur l’humanité. Comme dans toute adaptation, il prend quelques distances vis-à-vis du scénario initial avec des ajouts tels que les personnages des Gardiens. Après être tombé à la renverse lors de leur apparition à l’écran, je me dis que c’est un levier – certes un peu facile – mais néanmoins utile pour apporter de l’action tout en apportant une dose de « tranquilité » à Noé. Et pour cause : on aurait beaucoup moins bien digéré un film qui raconte l’histoire d’un hippie qui construit son radeau dans la forêt sans être inquiété par l’humanité qui, manifestement, a une dent contre lui…
Avant de voir Noé, on pourrait s’attendre, à l’instar de Black Swan par exemple, à un film ultra-manichéen. Le gentil Noé issu d’une gentille lignée face au méchant Tubal-Caïn vilain descendant du vilain Caïn. C’est vrai au début du film, mais la suite des évènements est orchestrée de manière à créer le doute dans l’esprit du spectateur, là où le propos est de purifier la Terre de toute la cruauté des Hommes, on se demande où la frontière entre bien et mal se situe, et c’est ce qui rend par moments ce Noé intéressant.
Les personnages sont tous extrêmement simples, parfois à la limite du cliché. Mais étrangement, j’ai envie de dire que c’est compréhensible, voire même logique, étant donné que l’on se trouve ici face à un récit biblique à forte connotation philosophique. Les personnages doivent être simples, matérialiser chacun une idée, une vertu, un doute, un danger. Je passerai donc volontiers sur la prestation assez neutre de l’ensemble des protagonistes pour parler de Russel Crowe. Crowe est ce genre d’acteurs capables du meilleur comme du pire. Personnellement, je l’avais quitté en très mauvais termes dans Man of Steel. Je trouve qu’ici, il matérialise très bien le héros, investi d’une tâche qui le dépasse, et qui au fur et à mesure du récit montre les failles et les doutes qui incombent à Noé. Sa manière de flirter avec la limite entre le bien et le mal, entre l’assurance et le doute font que le personnage de Noé gagne en force et en cohérence au long du film. Difficile de faire mieux avec un rôle aussi « casse gueule » à mon sens.
Vous l’aurez compris, Noé n’est pas un chef d’œuvre. Il s’approche par moments dangereusement de l’histoire facile ultra-manichéenne et peine à échapper à quelques longueurs dont il ne se sort que très maladroitement. Mais au final, je m’attendais presque à pire, et je trouve que derrière cet objet de cinéma imparfait se cache une réflexion intéressante. Au-delà de cela, l’aspect bêtement « action » ainsi que les effets spéciaux m’ont globalement plu, c’est pourquoi je retiens de Noé un avis étrangement positif.
D’autres liens si vous désirez creuser :
http://www.avoir-alire.com/noe-la-critique-du-dernier-film-de-darren-aronofsky
http://www.filmdeculte.com/cinema/film/Noe-5020.html