A Pixel Story, un titre qu’on aurait pu envisager pour une exposition sur l’univers du jeu vidéo. Et pourtant, il s’agit de celui d’un jeu indépendant, dans la pure lignée de ce qui est un des genres qui marche le mieux ces derniers temps : le jeu de plateforme à grosse tendance réflexion. Braid, Fez, ou encore Teslagrad, le succès de ce type de soft n’est plus à prouver, et nous force à nous triturer les méninges tout en restant concentré sur des réflexes poussés. Derrière A Pixel Story, on trouve Lamplight Studios, qui signe là son premier jeu. Originaire d’Angleterre, ces développeurs se sont rencontrés à l’université de Salford et ne se sont plus quittés, au point de n’envisager leur futur proche que dans ce studio qu’ils ont monté de leurs propres mains. A Pixel Story est donc le premier enfant de Lamplight Studios, et précisons qu’un prototype du soft a remporté le prix du Dare to be Digital. Ça ne fait que rajouter à la curiosité qui entoure le jeu.
A Pixel Story raconte l’histoire… d’un pixel. Un pixel vachement connu : celui de la balle de Pong, qui s’échappe du jeu pour atterrir au plus profond du système d’exploitation d’un monde numérique aux abois. Là, notre ridicule petit carré blanc prend la forme d’un petit être, et se voit être accueilli par Search, un robot utilitaire. Ce dernier nous apprend qu’on incarne le Chosen One, dans l’esprit une sorte de Néo sorti tout droit de Matrix, dont le destin est d’apporter des réparations au système. Aidé d’une casquette au pouvoir de téléportation, le héros de A Pixel Story va devoir venir en aide à une foule de personnages, tout en traversant diverses époques vidéoludiques.
A Pixel Story s’inscrit donc à fond dans un genre à la mode, mais aussi dans un style en vogue. L’esprit rétro est présent partout, et fait même partie intégrante du gameplay. Abordons celui-ci, car bien vite le joueur est mis aux commandes du Chosen One, qu’on découvre assez lourd dans son maniement. Mais c’est normal, nous sommes au tout début de A Pixel Story, mais aussi de l’histoire du jeu vidéo. Les sensations sont clairement celles de l’époque 8-bits (Nintendo et Master System), et le level design calme, pour le moment, nous permet de bien assimiler les commandes. Celles-ci sont simples au possible et se résument en fait à une seule : le saut. On bondit donc de-ci de-là, de manière assez classique. Cependant, l’histoire se met en place, et le Chosen One doit notamment récupérer sa casquette rouge, piquée par un volatile brigand. En suivant cette quête, nous découvrons tout ce qui fait l’univers de A Pixel Story, et c’est là que les choses commencent à se gâter.
A Pixel Story mise beaucoup sur son ambiance, en voulant toucher le retrogamer mais aussi le nouveau venu. Les références sont loin d’être pointues, et tant mieux afin de toucher une fourchette d’âge plus large. Seulement voilà, on attend de ces jeux indépendants qu’ils soient nickels niveau narration, afin que les moyens techniques limités soient oubliés. Les gamers d’aujourd’hui, qu’ils soient nostalgiques ou fraîchement débarqués, sont habitués à des graphismes de haute volée, il faut donc que les jeux comme A Pixel Story dépassent leur rendu à l’écran, cherchent à nous décrocher la mâchoire autrement qu’en nous balançant des milliards de polygones. Ce n’est pas le cas ici. Le scénario se dévoile à nous via des dialogues trop longs, et la récupérations de joyaux à l’utilité diverse : celle de nous accorder le passage au monde suivant, mais aussi de débloquer des bribes de background. C’est très plat, peu inspiré, et on finit par ne plus vraiment faire attention à ce que A Pixel Story nous raconte. Signalons d’ailleurs que le jeu n’est pas encore traduit en français, même si la page Steam annonce que les développeurs réfléchissent à des traductions dans diverses langues. Il faut donc un niveau de maîtrise de l’anglais moyen pour comprendre véritablement l’histoire de A Pixel Story.
A Pixel Story déçoit dans sa narration, mais n’a pas dit son dernier mot puisqu’après ce premier monde nous récupérons la fameuse casquette rouge. A partir de cet instant, le jeu devient beaucoup plus intéressant à jouer : un bouton de la manette est destiné à laisser ce couvre-chef derrière nous. Recommencer la manipulation nous ramène à elle instantanément. Un concept d’une simplicité déconcertante, qui va donner lieu à des énigmes de plus en plus tordues. Attendez-vous à un vrai crescendo de la difficulté, avec un niveau très élevé sur la fin. D’autant plus que les possibilités offertes par la casquette sont bien exploitées, avec là aussi une utilisation qui évolue au fil des mondes traversés. A Pixel Story réussit à faire un peu oublier la déception de narration grâce à des puzzles bien pensés, et il faudra vous accrocher pour arriver jusqu’à la fin. D’ailleurs, pour relever encore l’intérêt des joueurs en quête de challenge, le soft vous propose des salles de défi, dispersées dans les niveaux. Il n’est pas indispensable d’en venir à bout pour finir A Pixel Story, mais en arrivant au bout de ces épreuves vous gagnerez un des fameux joyaux. Les fans de 100% pourront donc s’amuser, d’autant que la vraie fin ne se débloque que si vous possédez toutes ces pierres précieuses.
Le gameplay de A Pixel Story n’est pas le seul domaine qui évolue au fil du jeu. Tout le côté technique suit aussi cette logique, suivant les pérégrinations du Chosen One, qui saute d’époque en époque pour mieux réparer le système. La musique et les graphismes suivent l’évolution de la technique, sauf que là aussi on ressent une certaine déception. Pourquoi avoir fait commencer le jeu à l’époque des consoles 8-bits japonaises, et pas à celles des Atari ? On regrette un manque de courage qui empêche A Pixel Story d’être un véritable voyage à travers l’Histoire vidéoludique. D’ailleurs, même la qualité de rendu des époques déçoit : on gagne certes en détails, en précision de la maniabilité, et en qualité sonore, mais on aurait aimé une évolution plus évidente. Le potentiel du concept de A Pixel Story n’est pas poussé à fond, et s’avère être plus gadget qu’autre chose.
Au final, c’est un sentiment étrange qui domine dans A Pixel Story. La partie réflexion et plateforme est très sympathique, mais le jeu manque de ce petit plus formel qui en ferait un soft à ne pas manquer. Surtout que le prix, 12€, ne pousse vraiment pas à tenter l’aventure sur un coup de tête. Quand à la durée de vie, elle est assez satisfaisante, et on peut prendre du plaisir à le refaire pour capter les nombreux easter eggs, au calme. Précisons que A Pixel Story se joue bien mieux à la manette, et sans aucun accroc sur les plus humbles des configurations (test effectué sur un PC portable AMD Dual-Core E1-2500, AMD Radeon HD 8240, 4 GB DDR3 ).
Visitez le site officiel de Lamplight Studios, le développeur de A Pixel Story.
Pour découvrir A Pixel Story en mouvement, vous pouvez regarder cette vidéo signée Dan Field.