Critique de Son of a gun, un film de Julius Avery avec Ewan McGregor. L’Australie peut-elle relever le niveau d’un marché du DTV un peu moribond ? Notre avis sans concessions.
Le cinéma australien est capable, de temps en temps, de nous envoyer des films d’un intérêt certain. Son of a Gun en est l’un des exemples les plus récents, mais le phénomène ne date pas d’hier. Mad Max est évidemment l’un des plus connus, à tel point qu’une nouvelle itération débarquera bientôt sur nos écrans cet été 2015. Mais n’oublions pas certaines perles plus méconnues, comme le thriller angoissant Long weekend, le très éprouvant Wolf Creek, ou encore l’équivalent porcin des Dents de la mer : Razorback. Certes un peu moins en vogue qu’à la fin des années 80, où le cinéma australien de genre était carrément qualifié de Ozploitation, ce dernier tente tout de même de se rappeler à notre bon souvenir, notamment avec ce Son of a gun un peu sorti de nulle part.
Son of a cell.
Son of a Gun raconte l’histoire de JR (Brenton Thwaites, remarqué dans The Giver ou Maléfique), un tout jeune homme envoyé directement en taule, sans passer par la case départ, pour six mois d’incarcération. L’univers carcéral se dévoile à lui, entre clans et agressions sexuelles sur les plus faibles. Très bon joueur d’échecs, JR attire l’attention de Brendan Lynch (interprété par Ewan McGregor, récemment vu dans Mortdecai), un condamné de longue date qui lui propose sa précieuse protection. Mais tout a un prix en prison, et surtout la sécurité : JR doit arranger, à sa sortie, l’évasion de Brendan et ses acolytes Merv (Eddie Baroo, aperçu dans Australia) et Sterlo (Matt Nable, Riddick), afin de préparer le braquage d’une mine aurifère.
Droit au but.
Son of a Gun débute pied au plancher, sans verser dans le sentiment, ni dans le développement d’un background. JR n’a pas de passé, on ne sait, et on ne saura rien de ce qui a bien pu emmener ce post-ado au duvet encore frais en taule. Et quelque part, on s’en fiche un peu, tant on comprend de suite que Son of a gun ne sera pas le genre de film à dramatiser ce qui paraît un peu secondaire. La prison est décrite comme un lieu de non-droit, où les détenus peuvent violer sans être dérangés. Un ton volontairement excessif, qui ne doit pas faire oublier une mise en scène surprenante. On se sent à l’étroit dans ce bagne, une impression typique de ces séquences de taule et que Julius Avery, le jeune réalisateur de Son of a Gun, réussit à bien exploiter. Le film débute sous le signe de l’abus, sorte de pêle-mêle de pas mal de clichés. Sauf que ça marche, et si on est un peu décontenancé lors de ce premier quart d’heure, ne sachant pas trop comment réagir face à certaines séquences merveilleuses de n’importe quoi, on a très vite le déclic : Son of a Gun a le potentiel d’un film fou.
GTA Australie City.
On comprend comment réagir face à Son of a Gun quand JR est libéré de prison, et se rend à son domicile de repris de justice. Un appartement splendide, spacieux, avec des voisines ultra-sexy (et en maillot de bain, évidemment), le tout payé par le grand mafieux du coin. Son of a Gun appartient dès lors à ces films complètement décomplexé, à l’image du récent John Wick, et peut commencer à le savourer véritablement. On a le droit à une séquence d’évasion d’une facilité déconcertante, alors que le jeune JR manie l’arme comme un héros de jeu vidéo. D’ailleurs, on pense parfois à GTA en regardant Son of a Gun, aussi bien dans le ton que dans les situations. Un personnage qui reçoit sa mission par téléphone, dans son immense baraque, va braquer un hélicoptère pour le diriger vers la prison afin de faciliter la fuite de son compère emprisonné, c’est le genre d’acte qu’on peut imaginer possible à Los Santos. Son of a Gun réussit à rendre très palpable cette impression, jusque dans les personnages secondaires un peu chtarbés, comme le vendeur d’armes sous ecstasy, qui donne lieu à une séquence bien drôle.
Requiem pour un cinéphile.
Son of a Gun a donc un côté divertissement décérébré complètement assumé, et n’essaie jamais de nous emmener autre part que sur cette route, courageuse de nos jours. Car si les cinéphiles vouent un culte à certains films ostentatoirement bébêtes, ces mêmes fanatiques d’un cinéma marginal ont du mal à être aussi ouverts quand il faut aborder un équivalent récent. Peut-être parce que ce qui est nouveau doit être, dans la tête des gardiens du temple, sérieux, ou tout simplement mauvais par essence. Ça fait quand même moins spécialiste d’adouber la folie d’un Carnosaur que celle du trailer de Jurassic World. C’est bien dommage, car un film comme Son of a Gun a tout pour figurer parmi ces œuvres folles. Après l’évasion, on assiste à la préparation du braquage, puis à sa réalisation. Tout y est tellement simple que ça en devient merveilleux. Même l’amourette entre le héros et la fille sexy du coin (Alicia Vikander, appréciée dans Le septième fils), obligatoirement en rapport avec le grand méchant, passage obligé de ce genre de film, est d’une facilité déconcertante. On atteint parfois un état de grâce dans Son of a Gun, celui de la maîtrise du cliché, utilisé à seul escient de faire sourire un spectateur de mèche.
« Tu vois, le monde se divise en deux catégories : les chimpanzés et les bonobos. »
Le problème est que Son of a Gun, contrairement à un John Wick, est de temps en temps plombé par des longueurs incompréhensibles. Le scénario, pourtant clair comme de l’eau de roche, perd son temps sur des détails peu intéressants. Jamais assez pour qu’on sorte du film cependant, qui trouve toujours une façon de nous ramener à lui de la manière la plus fougueuse qui soit. On se souviendra longtemps de la séquence, déjà culte, où l’excellent Ewan McGregor compare l’humanité à deux singes : les chimpanzés et les bonobos, afin de différencier les assidus au travail et ceux qui ne pensent qu’avec leur entre-jambes. Un moment de Son of a Gun incroyable, alors qu’un poster de singe domine le décor de l’appartement dans lequel le discours est prononcé. Fou rire garanti. D’ailleurs, le réalisateur de Son of a Gun doit avoir un compte à régler avec les primates puisque, lors du braquage, JR porte un masque de singe. On peut aussi citer la séquence de la voiture enflammée, afin d’éliminer les preuves de la présence des braqueurs. La bagnole en flamme est ensuite balancée dans un ravin…. au fond duquel un lac sommeille. Son of a Gun atteint alors le génie à l’état brut.
La série B est vivante !
On aura compris, Son of a Gun fait partie de ces films qui ne ressentent aucun complexe, et doit être abordé comme ça car son auteur l’a pensé de telle manière. Preuve en est la mise en scène, pas du tout mauvaise, comme l’est obligatoirement celle d’un mauvais réalisateur. On regrette tout de même une toute fin qui manque cruellement de punch, et déçoit dans son côté sage qui dénote avec le reste du métrage. Son of a Gun est donc un DTV (Direct To Video) de qualité, exactement ce qu’on attend de ce genre de programmes qui feront la joie des cinéphages dans une vingtaine d’années…
Son of a Gun, les bonus.
Découvrez le court-métrage Jerrycan, de Julius Avery, réalisateur de Son of a Gun, qui a reçu une mention spéciale à Cannes en 2008.
Suivez le guide pour découvrir la bande annonce de Son of a Gun.
Vous pouvez vous procurer le Blu-Ray de Son of a Gun à partir du 15 Juillet 2015 sur le site de la Fnac.
- Bonne mise en scène.
- Le discours du bonobo est culte.
- Ewan McGregor a une gueule.
- Des longueurs pourtant évitables.
- Le duvet de Brenton Thwaites.
- La fin décevante.