L’Affaire SK1, naissance d’un serial killer
Dans L’Affaire SK1 – traduction serial killer numéro 1- Frédéric Tellier nous entraîne sur les traces de Guy Georges, le tueur de l’Est parisien, de 1991 à 2001, année de son procès. C’est le jeune inspecteur Franck Magne, dit « Charlie » (Raphaël Personaz), qui est chargé de l’enquête. Nouveau au 36, quai des Orfèvres, il met tout son cœur et son énergie dans la résolution de cette affaire, qui empiète sur sa vie quotidienne et semble sans issue. Les enquêteurs piétinent, le SK1 est insaisissable, bien que ne bougeant que très peu, et continue de semer la terreur dans Paris. Lorsqu’il est finalement arrêté, il commence par nier les faits, avant de tout avouer, sur les conseils de ses avocats (Nathalie Baye et William Nadylam).
L’Affaire SK1 : Premiers pas derrière la caméra
Passionné par l’affaire Guy Georges, Frédéric Tellier a étudié son sujet pendant six ans. L’Affaire SK1, dont il co-signe le scénario, est son premier long métrage. Un sujet délicat car l’histoire est encore très récente et donc très présente à l’esprit des gens. Le film s’ouvre sur des images d’archives de l’arrestation du tueur avant de nous plonger dans l’enquête elle-même. Retour dans les années 90, donc, avec les télévisions à gros bouton, les minitels et Jacques Chirac président. Le décor de L’Affaire SK1 est planté et bien soigné : bureaux exigus sans ordinateur, vieux paquets de Camel et tous les policiers en veste de tweed marron. Ici, contrairement à La Prochaine Fois je viserai le Cœur, autre film français relatant une sombre histoire de tueur en série, on connaît peu, ou pas, le meurtrier. On se place dès le début du point de vue des policiers et des avocats. Et plus tard, de celui d’une des victimes. C’est assez fluctuant, et ça laisse une désagréable impression d’instabilité. Heureusement que les dates sont scrupuleusement notées en bas de l’écran, sinon gare à l’embrouille. L’Affaire SK1 semble être un tâtonnement sans fin entre plusieurs idées de mise en scène. La scène du weekend de pêche entre collègues du 36, quai des Orfèvres en est un bel exemple : elle est comme posée là, inutile, sans transition et surtout sans conséquences. Bref c’est un premier film et ça se sent à plein nez. Et on frôle carrément le manque de respect envers le spectateur quand l’inspecteur Charlie Magne entend l’un de ses collègues commenter la photo d’une jeune fille assassinée par SK1 en employant les mêmes termes que lui pour une affaire précédente. Il est comme frappé par une révélation et court dans son bureau. Mais les deux scènes étant rapprochées, on voit venir cette « révélation » à trois kilomètres. Penser que le spectateur à une mémoire de poisson, c’est très moyen.
L’Affaire SK1 : thriller trop humain ?
Avec le titre, on efface complètement l’identité du tueur. C’est L’Affaire SK1, et non pas L’Affaire Guy Georges. Cette inconnue dans l’équation nous amène paradoxalement peu de suspense. Oui, on connaît la fin de L’Affaire SK1, puisqu’on sait tous que l’homme est en prison pour le restant de ses jours. Mais on connaissait aussi la fin des Mesrine ou encore de La French. Et ce sont des films haletants à souhait qui ne lâchent rien. Les policiers de l’Affaire SK1 ont beau se prendre la tête et ne pas dormir, le spectateur reste passif, à peine réveillé par quelques rares moments bien écrits et bien joués, lorsque Guy Georges (Adama Niane, irréprochable) prend la parole au tribunal, ou lorsque l’une des victimes parvient à s’échapper.
Tellier a fait dans la sobriété. L’Affaire SK1 ne cherche pas à nous en mettre plein les yeux à grands coups de voitures explosées ou de violence insoutenable. Parfait. Les flics ne jouent pas les héros, et sont profondément touchés par cette affaire SK1. C’est l’humain qui l’emporte sur le spectaculaire. Il faut croire que dans l’Affaire SK1, la frontière est mince entre humanité et banalité, les dialogues versant dans l’ordinaire et ne servant pas les acteurs, qui font de leur mieux avec ce qu’ils ont. L’Affaire SK1 avait de quoi tenir la France en haleine, mais devient un drame brouillon et plat. Ni thriller, ni film policier, le film de Frédéric Tellier ne trouve pas sa place.
Encore une critique de L’Affaire SK1 ? C’est par ici.
- Adama Niane
- Le scénario brouillon
- Les dialogues qui tombent à plat
- La musique