Critique – Get on up

Get On Up est un biopic sur la vie de James Brown, le Parrain de la Soul. Critique du film.

Get on up est un biopic musical qui raconte la vie de James Brown, un des artistes les plus influents de ces dernières décennies. Né en Caroline du Sud, le showman (interprété par Chadwick Boseman) a eu une enfance difficile et pauvre en Géorgie. Élevé par un père violent, abandonné par sa mère, le jeune garçon grandit dans une maison de passes tenue par sa tante dans laquelle le laisse son père avant de partir pour la guerre. Avant d’atteindre sa majorité James Brown atterrit en prison pour le vol d’un costume. C’est là qu’il s’intéresse véritablement à la musique et qu’il rencontre le chanteur Bobby Bird (Nelson Ellis aussi vu dans True Blood). Le personnage principal de Get On up intègre alors le groupe musical de Bobby Bird, The Avons, qu’il renomme vite The Famous Flames. Le groupe connaîtra le succès avec la chanson Please Please Please. Alors que Bobby Bird est condamné à rester dans l’ombre de la légende, James Brown va véritablement entrer dans la lumière. Entre un jeu de scène, une voix, et un sens de la musique incroyable, James Brown va se démarquer et décrocher les succès. Celui qui s’est construit seul va initier le mouvement funk et acquérir plusieurs surnoms parmi lesquels Le Parrain de la Soul ou Mister Dynamite. En tant que génie de la musique, le chanteur va tout autant gérer le show que le business pour devenir le monstre sacré que l’on connaît. Malheureusement, derrière le génie musical, Get On Up révèle un être excessif, intransigeant et ultra-perfectionniste avec ses musiciens, violent avec ses compagnes, et surtout mégalomane.

Affiche du film Get on Up

Get On Up (James Brown, une épopée américaine)

La musique, oui, la musique…

Bonne nouvelle, Get On up est un biopic musical qui laisse une vraie place à la musique. Le film regorge des chansons de James Brown, donc autant dire que ça déménage et que c’est un pur régal auditif. Get On Up ne se contente pas de trois ou quatre chansons rabâchées tout au long du long métrage. On apprécie aussi qu’il ne s’agisse pas que de bribes de chansons de Mister Dynamite mais qu’au contraire, on nous laisse tout le temps de savourer les morceaux. La bande son est géniale et nous donne clairement envie de danser. D’un point de vue musical, Get on Up ne crée donc pas de frustration. Précisons que les tubes de James Brown sont tout autant utilisés de manière intra-diégétique qu’extra-diégétique, c’est à dire qu’il font à la fois partie du film et qu’ils illustrent l’histoire.

Par ailleurs, un grand travail de reconstitution a été mené dans Get On Up. De nombreux lives ont été recrées, notamment des séquences musicales alimentées par des archives noir et blanc ou couleurs de l’époque. On assiste donc aux prestations de Chadwick Boseman auxquelles viennent se greffer des archives subtilement incrustées de James Brown sur scène. La reconstitution et les archives se mélangent très bien, le passage entre les deux est extrêmement fluide. Remarquons d’ailleurs que la performance de l’acteur Chadwick Boseman dans Get On Up est assez réussie. Il donne vraiment vie à James Brown et s’investit particulièrement dans les prestations scéniques en reproduisant la gestuelle et l’énergie du chanteur. Le héros de Get On Up était un incroyable danseur qui déployait une énergie formidable sur scène et les séquences musicales nous permettent de nous en apercevoir.

Pour la petite anecdote, Get On Up est produit par Mick Jagger. Comme par hasard, les Rolling Stones font une apparition dans le film. C’est d’ailleurs très drôle de constater que James Brown n’acceptait pas de faire leur première partie. C’est encore plus amusant d’entendre l’un des personnages prédire que le groupe ne connaîtra qu’un succès éphémère et qu’il sera vite passé de mode. Enfin, il est agréable de revoir Dan Aykroyd à l’écran. On peut y voir un clin d’œil au film The Blues Brothers dans lequel l’acteur a joué avec James Brown himself. 

Get On Up ou un manque d’approfondissement

Get On Up se concentre tellement sur la musique et le talent de son personnage principal qu’il en oublie d’autres aspects. A bien des égards, Get on Up manque d’approfondissement. Tout d’abord, notons que James Brown est né en 1933 et donc en pleine ségrégation raciale aux Etats Unis. Si des éléments nous permettent de comprendre que sa vie a débuté dans ce contexte difficile, le sujet n’est qu’effleuré. A un moment donné, Get On Up évoque l’assassinat de Martin Luther King (qui a lui aussi son propre biopic, Selma), le pasteur qui a lutté contre la ségrégation raciale, et qui était un proche du chanteur. Le film donne très peu d’informations sur cet événement tragique. Ce n’est qu’en faisant des recherches pour écrire cet article que j’ai découvert que les deux hommes étaient proches. Malgré une minuscule illustration d’archives, aucune information n’est donnée sur les circonstances de la mort, ni le retentissement que cela a eu à l’époque. Get On Up se tourne exclusivement vers James Brown et sur le concert qu’il a donné pour éviter des émeutes. Globalement, l’ancrage historique aurait mérité d’être plus développé ne serait-ce que pour des raisons de clartés et de compréhension du spectateur.  Bien que le film soit très focalisé sur James Brown, il est regrettable que Get On up ne fasse que de très brèves allusions à certains pans de la vie du showman. Ainsi, il n’est que très peu question de la violence de James Brown envers ses compagnes, de ses soucis financiers lorsque sa carrière a commencé à décliner, de son passé de boxeur semi-professionnel, de la mort de son fils, de ses passages en prison ou de sa toxicomanie… Malgré tout, Get On up est très centré sur James Brown, ce qui laisse peu de place au reste. On ne parle que de lui et exclusivement de lui mais sous le prisme de l’artiste génial et non de l’homme qui a des défauts (pourtant pas des moindres) et qui a connu de nombreuses frasques. Ce n’est pas si étonnant que cela étant donné que le film est en quelque sorte conté par James Brown lui-même. En effet, dès le début, le chanteur (sous les traits de Chadwick Boseman) s’adresse directement à la caméra et donc au spectateur.

« Vous avez peut-être aucun de mes disques, mais je suis prêt à parier que dans tous vos disques il y a un petit peu de moi. Y a personne aujourd’hui, pas un rappeur, pas un chanteur qui est pas influencé par James Brown. Ouais c’est vrai. »

C’est un procédé que l’on retrouve aussi dans le biopic Jerseys Boys de Clint Eastwood. Get On Up va même plus loin puisqu’à la fin, le film nous montre James qui porte un regard sur lui-même au sens propre du terme. Au premier plan, il raconte comment son Live at The Apollo a été un succès phénoménal et nous donne sa définition du showbusiness. Pendant qu’il s’adresse à nous, il s’observe lui-même, car au second plan on le voit également jouer sur scène. Puis son moi narrateur et son moi scénique vont fusionner pour jouer le concert. A travers Get On Up, c’est Le Parrain de la Soul qui nous raconte comment il est devenu la référence, celui dont beaucoup d’artistes (y compris Mickael Jackson ou Prince, pas n’importe qui donc) se sont inspirés par la suite. Get On Up est réalisé de manière à montrer comment les événements de sa vie ont marqué, influencé et forgé sa musique. Le film ne respecte pas une narration chronologique mais montre bien comment les éléments de sa vie se sont imbriqués les uns les autres pour faire de lui LA référence, le boss. Si le film ne s’attarde pas sur les passages difficiles de la vie de James Brown c’est aussi parce qu’il démontre que l’homme a toujours su rebondir, que même dans les moments difficiles il ne se laissait pas abattre. Les seuls conflits qui sont plus développés sont ceux le confrontant à ses musiciens qui en ont marre de ne pas être traités convenablement et sa relation avec son ami de toujours, Bobby Bird, qui va finir par se dégrader. J’ai la nette sensation que ces deux aspects sont plus développés uniquement parce qu’ils influent directement sur la musique de James Brown. En vérité Get On Up est un film centré sur le génie musical de l’artiste plus que sur le personnage extrême qu’était James Brown…

Get On Up, un regard bienveillant sur James Brown

Dans Get On Up, il est évident que le réalisateur Tate Taylor a un immense respect pour l’artiste. Il ne cherche jamais à égratigner son image. Au contraire, si le film pointe quelques aspects de la personnalité excessive du Parrain de la Soul, il semble aussi les lui pardonner. Tate Taylor semble vouloir nous dire que malgré une enfance difficile et les épreuves qu’il a dû traverser, James Brown s’en est relevé et s’est construit seul… et cela serait suffisant à expliquer et donc à pardonner ses débordements. Même lorsqu’il s’avère de manière très claire que James Brown a eu un comportement inacceptable et qu’il est en tort, notamment au moment où ses musiciens se rebiffent contre lui à juste titre, c’est du côté du chanteur que se positionne le film. Dans Get On Up, le génie semble effacer tout le reste. Seul le génie compte, seule la musique compte. Au final, ce film parle du talent qui surpasse tout. 

Pour conclure, Get On Up est un film bien ficelé en terme de réalisation, de son et d’images mais qui souffre d’un manque d’approfondissement de certains sujets. On lui pardonne néanmoins ces lacunes car il est impossible d’être exhaustif lorsqu’on raconte une vie aussi fournie que celle de James Brown en seulement deux heures. S’il peut parfois paraître complaisant, Get On Up est le fruit de regards admiratifs portés sur l’œuvre de Mister Dynamite, le film est donc un bel hommage à la légende qu’il était et qu’il est toujours.

Pour en savoir plus sur Get On Up:

Critique - Get on up
Bien ficelé en terme de réalisation, de son et d'image, Get On Up manque d'approfondissement. Ce biopic sur James Brown retrace en deux heures une vie très dense. Un bel hommage à l'artiste de la part de Mick Jagger et Tate Taylor.
Scénario
Mise en scène
Acteurs
Image et son
On aime bien
  • La musique
  • Revoir Dan Aykroyd
  • La prestation de Chadwick Boseman
On aime moins
  • Le manque d'approfondissement historique et de certains aspects de la vie de James Brown
  • Le point de vue trop complaisant
3.7Note Finale
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