Imitation Game : la Grande-Bretagne va dominer les Oscars
Le biopic sur l’illustre inconnu Alan Turing, mathématicien qui a réussi à briser le code Enigma des Allemands durant la Seconde Guerre Mondiale, et à qui nous devons la victoire. Imitation Game revient sur son parcours atypique et semé d’embuches pour déceler les clés bien gardées de ce code secret.
Tout le monde s’emballe d’ores et déjà à propos de The Imitation Game (oubliez le « The » pour le titre français), mais qu’est-ce que c’est ? Pourquoi ? Comment ? En quel honneur ? Vous aurez toutes les réponses et bien plus ici même, à commencer la première. Imitation Game est le premier film anglophone du réalisateur norvégien Morten Tyldum. Était-ce un projet original ou a-t-il été un Yes Man sur le marché du cinéma ? Bonne question, ce qui n’enlève rien à la qualité de son Imitation Game, qui court déjà dans le peloton de tête pour la course aux Oscars 2015, que ce soit pour le Meilleur Film ou pour son casting détonnant. Tyldum est un véritable ovni dans l’industrie du film, un nom venant de nulle part pour réaliser ce film prodigieux.
Un projet en or
En parlant de son casting, je pense m’attarder énormément dessus puisque c’est une des qualités les plus impressionnantes du film. En plus d’un esthétisme léché, d’un scénario prenant (bien qu’il relate une histoire vraie et qu’on en sache déjà la fin, si on s’est attaché à faire des recherches) et de personnages extrêmement bien construits et écrits, ces derniers sont interprétés par les perles des acteurs britanniques. Non, pas de Colin Firth dans ce drame parallèle à la guerre, mais un Benedict Cumberbatch au meilleur de sa forme ! Croyez-le ou non, mais le rôle d’Alan Turing devait originellement être tenu par Leonardo Di Caprio. Quand on sait que Benedict est en train de rafler tous les prix pour sa performance, on se dit que Di Caprio a encore raté une nomination aux Oscars… Et pour cause, puisque Cumberbatch parvient à donner une telle authenticité au personnage que ne pas l’avoir choisi aurait été une grossière erreur. Il livre une performance à fleur de peau, touchante et très forte, même si la vision d’un « Sherlockian » discernera en son portrait de Turing les bribes d’un Sherlock Holmes. Si je devais comparer le Alan Turing de Benedict à ses rôles précédents (chose que je déteste faire, mais c’est pour vous donner une idée plus générale), je dirais qu’il s’agit d’un hybride entre Hawking et Sherlock. Rien que ça. Les sériphiles en seront ravis, d’autant plus qu’il est toujours drôle et singulier de voir Tywin Lannister (Charles Dance) donner la réplique à Sherlock Holmes.
Un film militant et bien ficelé
Mais même si Benedict Cumberbatch brille de mille feux sous les projecteurs, le reste de la distribution n’est pas en reste, à commencer par la douce Keira Knightley. Vous savez quoi ? J’avais du mal avec cette actrice avant Imitation Game, et depuis ma vision d’elle a radicalement changé. Non seulement sa performance était rayonnante et intelligente, mais son personnage était un personnage fort comme j’aimerais en voir plus souvent au cinéma. D’ailleurs, Joane Clarke, qu’elle interprète, le dit elle-même : « I am a woman doing a men’s job, I have the right being an arse ». Pour la première fois depuis longtemps au cinéma, une femme indépendante parvient à avoir une relation platonique et spirituelle avec le héros masculin. Et pour cause, le scénario aurait eu du mal à faire autrement… La vie de Turing fut mise à mal sur la fin à cause de son homosexualité dévoilée au grand jour. Le film s’attache donc à porter un regard courroucé sur le passé, condamnant la prise de position moyenâgeuse de la Grande-Bretagne vis-à-vis des sexualités dites « différentes » et « préjudiciables » au XXe siècle. Une scène marquante, la scène de clôture, met en scène les protagonistes autour d’un feu de joie. Cela ne représente pas seulement la disparition des décryptages d’Enigma, il s’agit aussi de ces personnages singuliers qui s’affranchissent du carcan de la société. Et c’est beau.
Que dire de plus ? Les rôles secondaires sont tous utiles à l’intrigue, rien n’est à jeter. La bande son est sublime, délicate et espiègle, composée par Monsieur Alexandre Desplat. Imitation Game est un pur produit esthétique, en plus de se reposer sur un fond solide. C’est brillant. L’image est époustouflante, la photographie est extrêmement classieuse, très élégante. Les couleurs et les costumes plongent le spectateur dans les années 40 comme s’il y avait toujours vécu. Le scénario est bien évidemment exceptionnel, se basant sur ces faits réels aussi prenants. Enfin, je pense que le mot final sera pour préciser (comme si c’était réellement la peine) que Imitation Game entre très directement dans la lignée du Discours d’un roi. Le niveau va être très très haut pour les Oscars 2015, et Imitation Game sera catapulté dans la course.
Imitation Game, un long-métrage historique au casting exceptionnel et 100% British, militant gay-friendly et féministe, émouvant, intelligent, et qui pousse à la réflexion. Emmené par Benedict Cumberbatch, qui plus est. Que demande le peuple ?
Imitation Game, en salles le 28 janvier 2015.
- Benedict Cumberbatch
- L'atmosphère des années 40
- Le suspense constant même si la finalité du film est déjà connue
- On cherche encore