Critique – La Vénus à la fourrure

Critique – La Vénus à la fourrure

Sorti en salles en novembre dernier, La Vénus à la fourrure est un huis clos particulièrement troublant. Réalisé par Roman Polanski, il réunit à l’écran les seuls Emmanuelle Seigner et Mathieu Amalric dans un théâtre désert.

Le scénario de cette Vénus à la fourrure tient à peu de choses. A la fin d’une journée d’auditions pour le moins décevante, un metteur en scène reçoit la visite d’une comédienne pour le moins étrange. Une actrice qui va à travers sa spontanéité et son esprit lui donner une autre vision de la pièce qu’il adapte, intitulée La Vénus à la fourrure. Une relation ambiguë va naître entre metteur en scène et comédienne, entre le maître et son « jouet ». Mais le rapport de forces n’est pas forcément celui auquel le spectateur attend…venus-fourrure

La Vénus à la fourrure reprend le procédé très intéressant de la mise en abyme d’une pièce de théâtre, et de la manière de l’adapter et de la faire vivre à partir d’une version papier. Roman Polanski a choisi de nous faire vivre cette histoire à travers un huis clos assez torturé, réunissant deux personnages tout à fait opposés. Mathieu Amalric tout d’abord, campe avec brio un metteur en scène austère et pointilleux, quasi obsessionnel. Comme beaucoup de metteurs en scène, il a une idée précise du rendu qu’il attend et pas mal d’idées arrêtées concernant sa conception de La Vénus à la fourrure. Face à lui Emmanuelle Seigner incarne le trublion qui vient bousculer Amalric. Elle joue une actrice spontanée, instinctive et décomplexée. Un brin vulgaire, voire cruche au début, elle se révèle bien plus profonde qu’il n’y parait par la suite. Et bougrement mystérieuse. Qui est cette fille délurée qui débarque avec ses costumes, qui connait l’ensemble des répliques et qui semble avoir tout compris au personnage de La Vénus à la fourrure ?

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Hormis ce qu’ils nous laissent deviner sur certains traits de personnalités, les deux personnages demeurent tout au long du film très mystérieux. Chez lui, on se demande quelle relation il entretient avec l’œuvre, et s’il ne partage pas les mêmes tourments que le personnage masculin de la pièce. Se pose alors la question de la part personnelle qu’il insuffle dans son adaptation de la pièce. Chez elle, on constate que le contraste entre l’actrice vulgaire et le personnage raffiné qu’elle joue s’estompe peu à peu, ce qui lui donne un aspect particulièrement surréaliste. Au point qu’on ne sait si cette Vénus à la fourrure est vraiment réelle, si elle n’est pas le fruit de l’imagination du metteur en scène…

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Au fur et à mesure de La Vénus à la fourrure, on remarque une relation intéressante des deux protagonistes qui deviennent peu à peu leur personnage, ce qui créé une situation particulièrement ambigüe. On ne sait si ce sont le metteur en scène et l’actrice qui parlent, ou leurs personnages. Comme si leurs personnages ne sont pas le prétexte qui leur sert à expier leurs tourments respectifs. Des rapports de domination successifs s’instaurent, et tournent constamment, et la limite entre réel et fiction devient de plus en plus floue à mesure que le huis clos avance.

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Je passerai sur une fin que j’ai plus moyennement apprécié pour retenir de ce film l’excellence des deux acteurs, qui jouent avec une impressionnante finesse leurs deux personnages. Le mélange des deux est détonnant, et j’ai vraiment apprécié cette démonstration de jeu, de sensibilité, de charisme de leur part. Du théâtre brut, une confrontation intense, une atmosphère lourde. La Vénus à la fourrure nous fait passer par des stades divers, entre le malaise profond, l’amusement et la curiosité. A voir !

Critique - La Vénus à la fourrure
Ce film est une véritable curiosité du cinéma. Un très bon huis clos, et un choc brut de personnages superbement interprétés.
Acteurs
Scénario et mise en scène
Ambiance
On aime
  • Le duo Seigner-Amalric, de très haut vol
  • L'ambiance pesante du huis clos
On aime moins
  • Une fin un peu étrange à mon goût
3.7Note Finale
Note des lecteurs: (0 Vote)
  • Thibaut COCAIRE

    Le film est français car les acteurs sont français. J’ai eu TRES peur du personnage d’Emmanuelle Seigner au début, qui fait vraiment grosse pétasse prête à tout pour décrocher son rôle.
    En revanche sur l’ambiance du film, je trouve beaucoup de Polanski, avec un côté slave. Pas vraiment français, quelque chose de beaucoup plus dépaysant.
    Et oui, Amalric a ce regard, que l’on qualifierait de tantôt surpris, désarçonné, tantôt fou à lier, passionné… Très gros volume de jeu

  • Camille LATOUCHE

    Ca m’a tout l’air du film français de base avec une fin qui, selon ton article, ne reflète pas vraiment la qualité générale de ce film. +1 pour la présence de M. Amalric