Critique – Mr Turner

Un Biopic sur la vie du peintre de la lumière, Mr Turner

Joseph Mallord William Turner n’est pas le nom complet du personnage joué par Orlando Bloom dans Pirates des Caraïbes, mais bien celui du célèbre peintre Anglais du 19ème siècle. Un Biopic lui a été dédié en décembre dernier sous le nom de Mr Turner. Voilà cette critique!

Mr Turner a trouvé son style

Biopic provient de l’anglicisme : Biographical motion picture. C’est une œuvre biographique de fiction visant à retracer la vie, ou partie de celle-ci, d’une personne ayant réellement existé. Ce genre cinématographique existe depuis les débuts du cinéma avec par exemple le célèbre Cléopâtre de Georges Melies en 1899, mais on note un réel regain depuis les années 2000 avec des films comme : La Môme, La Dame de Fer, The Social Network, Jobs, Lincoln et j’en passe. De facture plus ou moins réussie, on se penche sur celle d’un personnage méconnu du grand public, celui du peintre Mr Turner.

affiche cover du film mr turner

Mike Leigh est à la réalisation. Il a déjà signé de nombreux films dramatiques tels que All Or Nothing ou Naked. Il est connu pour sa méthode de travail axée sur l’improvisation et la participation des acteurs à l’écriture, visant à améliorer le réalisme des scènes. Une fois n’est pas coutume, cette technique sera utilisée dans Mr Turner par son acteur principal Timothy Spall. Surtout révélé pour son rôle récent de Peter Pettigrew dans Harry Potter, son faciès atypique ne passe pas inaperçu et reflète une certaine peine, en corrélation directe avec la vie du peintre anglais Mr. Turner.

Mr. Turner a eu une vie de solitude

La vie réelle du peintre anglais n’est pas des plus joyeuses. Sa mère et sœur mortes jeunes, il rentre à l’école de la Royal Academey à l’âge de 14ans. En 1796, il y expose sa première création : « Pêcheurs en mer ». D’un style assez rigoureux, Mr Turner est connu pour ses paysages de Grande Bretagne, particulièrement ceux de la mer qu’il affectionne particulièrement. Les représentations à l’aquarelle des ondulations de couleur et de lumière lui vaudront le nom de « Peintre de la Lumière ». A seulement 27 ans, il devient titulaire de la Royal Academy où il exposera quasiment tous les ans jusqu’à sa mort. Mr Turner voyage beaucoup en Europe pour y trouver l’inspiration et peut-être pour y voir un exutoire à sa vie de Londres. Jamais marié, il a pourtant eu deux filles qu’il n’élèvera pas. Vivant principalement avec son père, dont le décès plongea le peintre dans une dépression, il choisira de se retirer de la vie publique et vivra jusqu’à sa mort avec la veuve Ms Booth, dont il prendra le nom pour garder l’anonymat. A la fin de sa carrière, Mr Turner deviendra excentrique et réservé, affecté par sa situation familiale, mais aussi par l’arrivée d’un nouveau style artistique et de la photographie, à laquelle il n’adhérera que modérément. Il léguera une grande partie de ses œuvres à la National Gallery, et prononça ces dernières paroles  «  The Sun is God – Le Soleil est Dieu » sur son lit de mort en décembre 1851.

Aparté sur la technique picturale de Mr. Turner

Alors que son début de carrière se caractérisait par la représentation réaliste de paysages, la seconde partie est bien plus imaginaire. Des critiques sont possibles sur ses œuvres lumineuses, à la limite de l’irréel, montrant le pouvoir suggestif des couleurs. Certains lui donnent même le nom de « Peintre des incendies » avec peut-être ici l’une de ses œuvre les plus connue.

The Slave Ship Le Négrier Turner

Le Négrier – Joseph Mallord William Turner – 1840

Certainement précurseur de l’impressionnisme, il est possible de pousser le style, en l’absence de représentation du support, vers les prémices de l’abstraction lyrique pourtant révélée 100 ans après.

Mr. Turner est une adaptation réussie.

Commençons par là, car oui ce qu’il faut retenir de la critique de cette adaptation de la vie de Mr Turner, c’est qu’elle est une réussite sur le plan de réalisme, de l’authenticité des personnages et sur la vie du peintre. Timothy Spall représente très bien ce que l’artiste aurait pu être. Dans les expressions du visage, mouvements et dialogues, on se plonge totalement dans la vie de Mr Turner. On y suit sa dépression après la mort de son père, sa lente évolution artistique, ainsi que ses déboires relationnels. On sent qu’il se refuse l’attachement affectif, non pas par cruauté, mais par renoncement de faire peser son fardeau sur ses proches.

La mise en scène est classique, avec une musique lente au piano pour porter l’ambiance de l’époque. Les cadrages alternent plans larges et format américain en fonction de la situation. Rien de novateur donc dans cette adaptation de Mr Turner de 2h30. Cependant, des petites lacunes sont à noter. La première étant peut-être dans le manque, à mon sens, de visualisation des réalisations de l’artiste. On cherche pendant tout le film les tableaux de Mr Turner ou les moments où il puise son inspiration. Uniquement vu à deux reprises, on aurait peut-être voulu en savoir plus sur les peintures en elle-même.

Car ce Biopic est surtout tourné sur le personnage et malgré la meilleure volonté du monde, cette adaptation repose sur une histoire non passionnante, ou en tout cas, pas suffisamment pour retenir l’attention d’un spectateur pendant la durée du film. Mr Turner n’a pas créé une plus grosse capitalisation boursière avec une pomme, n’a pas établi l’acte d’abolition de l’esclavage ni n’a embrassé un poteau dans le tunnel de la voie Georges Pompidou. Il est très difficile de scénariser et de créer un suspense scénaristique dans la vie d’un peintre dont les œuvres ne sont sûrement pas connues du grand public, aussi dommage que cela soit.

La critique que l’on retient est que Mr Turner est bonne adaptation. Ce Biopic porté par Timothy Spall correspond à ce que l’on imagine que la vie du peintre aurait pu être. Un homme sensible dans sa vision artistique de l’utilisation des couleurs et à la vision profonde des paysage, conception qu’il gardera jusqu’à son dernier souffle : The Sun is God. Mais qui reste difficile de porter à l’écran par la source même de l’adaptation, une vie reculée, sans grand rebondissement suffisamment important pour susciter de l’attention de la part d’un spectateur pour plus de 2 heures. Mr Turner est plus un documentaire qu’un film.

Si vous voulez en savoir plus sur Mr Turner, je vous conseille les liens suivants:

http://www.telerama.fr/cinema/films/mr-turner,491810,critique.php
http://www.lemonde.fr/cinema/article/2014/12/02/l-etourdissant-mr-turner-de-mike-leigh_4532566_3476.html

Critique - Mr Turner
Mr Turner est une bonne adaptation.
Acteur
Mise en scène
Scénario
Image et son
On aime bien
  • Timothy Spall dans le rôle du peintre
  • L'ambiance du film
On aime moins
  • Absence normale de scénario
3.7Note Finale
Note des lecteurs: (0 Vote)
    • Isabelle de Guinzan

      Entièrement d’accord avec votre critique ! Mais j’aurais du coup été un peu plus sévère sur la note, même si le film mérite clairement la moyenne. Belle adaptation en effet, on y « croit ». Notamment grâce à la performance de Timothy Spall qui donne vraiment corps à ce personnage atypique. Mais j’ai moi aussi été surprise et déçue de ne pas en voir plus sur la peinture elle-même, sur l’inspiration du peintre ! Et effectivement, le film peine à retenir l’attention sur 2h30…

      • Benoît Decoopman

        Merci pour votre commentaire Isabelle. Je pense que ma note comprends également une certaine volonté de ma part de valoriser ce genre de travail. Faire un biopic est à la mode, mais le faire sur un homme qui demande qu’à être re/découvert mérite une gratification. Dans le même genre: Imitation Game. Alors que l’adaptation est très douteuse, mettre en lumière cet homme doit, a mon sens, être reconnu.