Critique – Nymphomaniac : vol. 2
Le récit de Joe, nymphomane auto-proclamée, continue là où il s’était arrêté. Nymphomaniac vol. 2 est la suite directe du premier opus, coupé volontairement pour une question de durée. Suite et fin de ses déviances et excès de sexe…
Nymphomaniac vol.2 est la suite de notre article sur le volume 1. Je vous invite donc à y jeter un coup d’œil si vous arrivez directement sur celui-là. Alors qu’on s’était attardé sur le découpage et la mise en scène dans la première partie, nous allons aborder le jeu d’acteurs et plus particulièrement le film dans sa globalité.
La théâtralité dans Nymphomaniac
La mise en scène théâtrale reste la structure de Nymphomaniac. Les deux films n’étant en réalité qu’un film découpé arbitrairement, le deuxième volet commence directement là où s’achevait le premier. Alors que l’on s’attardait sur l’enfance et l’adolescence de Joe, jouée respectivement par Maja Arsovic puis Stacy Martin, Nymphomaniac volume 2 suit la chronologie et s’attarde sur les faits plus récents.
Nymphomaniac dispose d’une théâtralité également, dans l’opposition de deux personnages. Ils sont ici des reflets d’archétypes de la littérature. Joe est dans l’extravagance du sexe, et opposée à Seligman, son double inverse. Celui-ci est le contraire de Joe, rationnel, éclairé, donnant des anecdotes, structuré, et surtout asexué. Cette confrontation de personnages permet de mesurer le gouffre entre les sentiments ressentis par les personnages. Mais aussi de nous donner un angle pour appréhender la narration en tant que spectateur.
Malgré ses expériences plus que multiples, Joe trouve l’amour en Jérôme, interprété par Shia LaBeouf (bonne surprise ici de l’acteur qui montre une facette très intéressante). Nous suivons notre nymphomane dans ses destructions sentimentales, mais aussi physiques et sociales. Un très bon exemple émouvant est celui de la mort de son père. Mais Nymphomaniac c’est également une mise en abyme sur le personnage et les idées que le réalisateur veut véhiculer via Joe. La seconde partie du film continue sur des situations potentiellement improbables, mais qui restent, dans le contexte, tout à fait plausibles avec une affectation symbolique très forte. Certaines scènes sont des clins d’œil à de précédents films du réalisateur, sorte d’entrelacement constant de l’ensemble de ses œuvres cinématographiques. Cette mise en scène renforce la sensation de chaos des personnages dans ce dernier film. Il est important de remarquer ici que Lars Von Trier pousse un peu trop dans Nymphomaniac son envie de montrer et véhiculer ses idées, cassant alors l’intérêt. Se prendre le chou pour chopper la grosse tête ? On ressent cette envie très forte de prouver quelque chose au milieu du cinéma, et peut-être à tort.
Le message véhiculé par Nymphomaniac
La nymphomanie est traitée au début comme une maladie, quelque chose de mauvais. Seligman tente de raisonner Joe, et donc le spectateur, en relativisant les situations et en rapprochant les événements avec d’autres, moralement justifiés. Dans la seconde parte de Nymphomaniac, notre protagoniste arrive alors à nous convaincre de l’unité nécessaire de sa nymphomanie à son corps et rythme me vie, transformant alors sa situation en quelque chose de positif. On change alors la vision que l’on a sur le personnage, transformé et sûr de lui dans ses prises de décisions. Assurée et confortée dans sa situation, Joe va se remettre sur le droit chemin et utiliser son ami Seligman pour retrouver les bonnes mœurs. Nymphomaniac nous montre le pouvoir de la construction et la remise en cause par l’amour, bien qu’ici platonique.
Nymphomaniac affiche également la faiblesse de l’être humain, en une illustration de la balance entre le bien est le mal. C’est peut-être ce point qui résumerait le mieux le film dans ses deux parties.
Nymphomaniac se veut provocateur dans sa forme érotique/porno, mais permet de se rendre compte qu’il est bien plus dans le fond. Il soulève des problèmes identitaires typiques de la société moderne, les critique violemment et montre une facette totalement différente du politiquement correct. C’est sans doute ici l’intérêt de ce film. A savoir si son réalisateur ne se perd pas lui-même dans son ambition toujours aussi forte de prouver son talent dans ce domaine.
Je vous propose deux autres critiques sur Nymphomaniac vol.2 :
http://www.senscritique.com/film/Nymphomaniac_Volume_2/9098028
http://www.lesinrocks.com/cinema/films-a-l-affiche/nymphomaniac-volume-2/
- Les acteurs
- Le basculement du récit
- L'auto-dérive du réalisateur