Critique – Tangerines

Tangerines, un drame émouvant dans une Géorgie en pleine guerre civile

Rares sont les films qui traitent de sujets méconnus et qui arrivent à notre attention. Alors parfois, il faut donner sa chance à l’un d’eux. Tangerines fait partie de cette catégorie. Mêlant histoire, humanité, religion et appartenance ethnique, ce récit ne vous laissera pas indifférent.

Tangerines, une représentation aux Oscars 2015

Tangerines, (en géorgien : მანდარინები ; en estonien : Mandariinid) est un film dramatique coproduit par l’Estonie et la Géorgie. Sorti en 2013, il n’est pas doublé en français (des sous-titres sont possibles). Il a remporté le prix du meilleur film estonien au festival du film Nuits noires de Tallinn 2013. Comme le film Ida qui représente la Pologne, Tangerines représente l’Estonie aux Oscars 2015, nommé à l’Oscar du meilleur film en langue étrangère. Il est aussi nommé aux Golden Globes dans la même catégorie.

En corrélation totale avec les événements tragiques récents, il n’est pas sans rappeler que l’auto-destruction de l’humain est constante et omniprésente. L’histoire n’est-elle pas faite pour éviter les mêmes erreurs ? Il semblerait que non.

Tangerines film affiche

Tangerines, une histoire intemporelle

Tangerines se déroule pendant la guerre d’Abkhazie. Cette partie de l’ancienne Union Soviétique souhaite se rapprocher de la Russie, la Géorgie étant ce qu’on pourrait appeler unie et indépendante à l’époque. L’armée fédérale russe et les séparatistes abkhazes rentrent en conflit avec l’armée géorgienne de 1992 à 1993. Sans partir sur les responsabilités de chacun, il est quand même possible d’admettre le massacre civil. Il en résultera un démantèlement de la Géorgie et une unique reconnaissance par la Russie de l’Abkhazie et l’Ossétie du Sud en 2008.

Tangerines raconte l’histoire d’un grand-père estonien, expatrié de son pays natal, comme sûrement beaucoup d’autres de leurs pays d’origine pendant l’Union Soviétique. Il réside dans les montagnes géorgiennes avec un autre estonien et ils cultivent tous deux des mandarines (tangerines en anglais, qui vient de la ville de Tanger au Maroc qui était la principale exportatrice de ce fruit). Une attaque devant leurs maisons entre Georgiens et Abkhazes laisse deux survivants, des deux factions opposées. Les quatre hommes se retrouvent alors en confrontation idéologique.

Tangerines, des moments simples et touchants

Les deux guerriers se retrouvent face à face. L’un trop faible, l’autre ayant juré de ne pas tuer dans la maison du grand-père. Nous avons un trio d’acteur faisant la base du film. Le vieil homme, au milieu apporte l’équilibre, la sagesse mais parfois également l’autodérision. Tangerines est focalisé sur les émotions et sur les raisons des trois hommes de se côtoyer. On comprend rapidement que les deux opposés finiront par se rapprocher. Même en sachant cet élément, cela ne retire en rien l’intérêt. Premièrement, le fait que l’environnement scénique est restreint à la maison et aux quelque mandariniers oblige alors le spectateur à rester focalisé sur les personnages. Il n’y a pas d’action, bien sûr pas d’effets visuels et l’on ne compte que trois fois de la musique : le même morceau au violon. Zaza Urushadze, son réalisateur joue la carte de la simplicité avec des plans caméra à l’épaule, réaliste et immersive.

Deuxièmement, car le dénouement n’est pas si simple et évident. Tangerines relate une période difficile de cette région où les protagonistes ne savent plus pourquoi ils se battent, la haine des deux peuples ne semblant reposer sur aucune base. C’est ici tout l’apport du vieux grand-père estonien, qui n’est pas parti de cette guerre, et veut tenter de rapporter la raison et l’humanité. Parfois en parlant avec sagesse puis avec violence. Une alchimie s’opère par des moments de suspense, mais on sourit parfois des moments simples de la vie qu’ils partagent.

Tangerines, un questionnement universel.

La question de la religion est aussi rapidement traitée. Le mercenaire tchétchène est de confession musulmane, alors que l’on suppose le géorgien orthodoxe, chrétien en tout cas par son port de la Croix. Cette différence permet un moment de compassion mutuelle, et un vrai message de respect des religions entre les deux soldats et montre un rapprochement à l’égard de l’autre. Difficile de ne pas penser à certains événements récents, bien qu’ils soient malheureusement intemporels et universels.

Tangerines a pour intention de montrer la simplicité de l’homme et d’y réduire les barrières idéologiques. Fait de manière sobre, concis dans la mise en scène et en éloignant de tous les stéréotypes du genre, nous nous retrouvons plongé dans une remise en cause des endoctrinements. En estonien et en russe, nous ne pouvons nous empêcher de regretter une perte de l’émotion qui passe par la langue. Tangerines est un film qui donne envie de réfléchir et de comprendre certaines parties méconnues de notre histoire.

Pour en savoir plus sur Tangerines, je vous conseille les liens suivants :
http://cineuropa.org/nw.aspx?t=newsdetail&l=fr&did=283404
http://waronscreen.com/film/62/tangerines-mandarines

Critique - Tangerines
Tangerines nous laisse pensifs sur l'homme et la relation aux autres.
Acteurs
Image et son
Scénario
Mise en scène
On aime bien
  • La simplicité de la réalisation
  • L'émotion
On aime moins
  • La perte de sensations dû à la langue
3.5La note
Note des lecteurs: (4 Votes)
    • / Camille LATOUCHE

      Une nouvelle fois Benoît, je te remercie pour cette découverte.