Keira Knightley pique sa crise dans Girls Only, de Lynn Shelton. Notre critique.
Megan (Keira Knightley), 28 ans, a plein de diplômes mais pas de poste fixe. Elle vit avec Anthony, un photographe naïf et rêveur qu’elle fréquente depuis le lycée et qui rêve de l’épouser. Il faut dire que dans son cercle d’amis, les couples s’installent, font des enfants et se marient. Malgré la pression exercée par son amie Allison, Megan n’est pas sûre de vouloir s’engager dans cette voie et ne semble pas pressée de se poser avec la panoplie petit-mari-labrador-monospace. Aussi prétend-elle partir pour une semaine de séminaire de développement personnel alors qu’elle souhaite juste prendre un peu de distance et traîner avec sa nouvelle copine, une adolescente nommée Annika (Chloé Grace Moretz), qui vit seule avec son père (Sam Rockwell), un avocat divorcé. Megan semble très à l’aise avec la jeune fille et ses potes de lycée, pourtant loin de ses fréquentations habituelles…
Girls just wanna to have fun
On connaissait la crise de la quarantaine et le démon de midi. Voici la crise de la « presque – trentaine ». Une bonne idée de Lynn Shelton qui embauche Keira Knightley pour incarner une jeune femme en plein doute qui semble avoir tout pour être heureuse : un petit ami prévenant qui veut lui passer la bague au doigt, un cercle d’amis très soudés et des parents en or, à commencer par son père qui l’adore.
Mais quand on ne sait pas si on veut épouser Anthony et qu’on se sent en décalage avec ses copines de fac qui froncent les sourcils à tout bout de champ et dont le sens de l’humour a fait un virage à 180 degrés, se tourner vers des ados qui n’ont pour préoccupations que le bal de promo et le maquillage charbonneux, c’est confortable et douillet. Le décor est planté : une héroïne au bord du pétage de plomb et dont l’enthousiasme est sans cesse battu en brèche par ses proches. Girls Only se présente comme un teen movie : une bande d’ado en quête de bières et d’expérience, une adulte immature à la recherche de sensations… Un cocktail qui pourrait être détonant qui tourne finalement à la comédie romantique. Avec Girls Only (Laggies, en version américaine), la réalisatrice mélange les genres et renverse un cliché : le retour à l’adolescence, oui, mais avec une femme dans le rôle principal. Et la jolie Keira Knightley, qui troque le costume d’époque pour le jean slim, est très convaincante dans la peau de l’adulescente Megan. Avec Chloe Grace Moretz, elles forment une équipe fraîche et dynamique qu’on suivrait jusqu’au bout de la nuit.
Girls Only ou une histoire qui nous échappe
Lynn Shelton, à qui l’on doit notamment Humpday et Your Sister’s Sister, soigne sa dernière création comme la vitrine d’un magasin branché. En boutique, photographie girly et thèmes variés tout à fait d’actualité. On aborde, dans le désordre : les amitiés adolescentes qu’on voudrait éternelles, les diplômes et l’emploi, et surtout la question de l’appartenance à un groupe qui nous fait suivre le mouvement quand on voudrait sortir du moule. Girls Only, qui commence et finit – ou presque – avec un bal de promo ne boucle pourtant pas la boucle. Aussi attachant soit-il, le personnage de Megan n’évolue pas et ne tire aucune leçon de ses errances. Malgré quelques tirades bien senties – sur l’utilité des mathématiques, par exemple – la morale de l’histoire est assez évasive. Entre bonnes idées et dialogues qui tombent à pic – souvent d’ailleurs lors de discussions entre Megan et ses amis de la fac qui sont en décalage permanent – réalisatrice et scénariste ont du mal à joindre les deux bouts de certaines scènes. On a un petit côté bancal qui nous empêche de rentrer complètement dans l’histoire.
Réservé aux filles ?
Le Casting de Girls Only est impeccable et donne son maximum pour faire vivre le scenario; y compris pour les rôles secondaires qui sont pourtant peu développés, à l’instar des intrigues sous-jacentes décidément trop minces. Et c’est grâce à l’énergie des acteurs que l’on passe sur certaines incohérences : admettons qu’une magnifique adolescente comme Annika ne parvienne pas à attirer le garçon de ses rêves. Admettons également que Megan soit amoureuse d’Anthony, présenté comme un type un peu bébête et qui était soi-disant le beau gosse de la fac. Mention spéciale au passage à la jeune Kaitlyn Dever qui donne tout son potentiel comique pour interpréter Mitsy, une copine pince-sans-rire d’Annika.
Au final, Girls Only est une comédie agréable et honnête, avec des acteurs et une réalisatrice qui aiment leur film, mais trop de flou et d’incohérences empêchent le spectateur d’adhérer complètement à l’ensemble. Et si le titre Girls Only ne colle pas du tout à l’histoire – Laggies, qui désigne un adulte paumé, est beaucoup plus adapté – il est excellent pour indiquer le public auquel il est destiné.
Une autre critique ? C’est par ici : http://www.madmoizelle.com/girls-only-cinemadz-349661
- La fraîcheur et la sympathie des deux actrices principales
- Un sujet pertinent
- Le titre français ne colle pas à l'histoire
- Les petites incohérences
- L'ensemble reste assez plat