Critique de La règle du jeu, un film réalisé par Ambroise Carminati. Action ou vérité entre stagiaires, notre avis doit trancher.
La règle du jeu est le tout premier film d’Ambroise Carminati, ancien élève de l’EICAR (École Internationale de Création Audiovisuelle et de Réalisation). Avec son compère Andréa Vistoli, rencontré sur les bancs de l’école, ils ouvrent Et Bim, un collectif qui mise notamment sur les nouveaux médias, et donne les moyens à des talents de pouvoir trouver un cadre idéal pour une création totalement libre. Les deux fondateurs ont plusieurs projets dans leurs bagages, mais c’est avec La règle du jeu qu’ils décident de lancer les festivités.
Coup du chapeau.
La règle du jeu s’intéresse à un groupe de juniors, alors qu’ils terminent leur dernier jour de stage. Ils apprennent que cinq d’entre eux feront l’objet d’une proposition d’embauche, sans pour autant savoir précisément qui. Alors que la soirée de départ se passe relativement bien, la bande se propose de jouer au jeu du chapeau : les participants doivent écrire plusieurs questions et leurs destinataires, les déposer dans un couvre-chef puis se le passer au rythme des interrogations. Ce qui débute comme un jeu de la vérité, plein de franchise, ressemble de plus en plus à un règlement de compte alors que les egos se dévoilent. Toutes et tous doivent pourtant se plier à la règle du jeu.
Le jeu de la vérité vraie.
La règle du jeu prend donc comme concept l’un des jeux de sociétés les plus simples, celui de la vérité. Quoi de plus pertinent pour un film au budget rikiki, tourné en une seule nuit, mais plein d’une belle volonté. Le but est simple, allier deux situations typiques de notre temps : la tension professionnelle, qu’on feint de ne pas ressentir en société, et notre rapport de plus en plus malsain avec la transparence à tout prix. La règle du jeu se charge de faire le lien, et petit à petit on est pris dans un flot d’émotions assez jubilatoires.
Un casting brillant.
Comme dévoilé plus haut, le tournage de La règle du jeu s’est déroulé sur une seule nuit. Il a fallu mettre en place des semaines de répétitions bien entendu, mais les prises de vues se sont déroulées sur huit heures d’affilée. Des conditions parfaites pour obtenir des acteurs une interprétation des plus authentiques. Abordons tout de suite le casting, car il est une part très importante dans la réussite du projet, au même titre que la direction d’acteurs. Ils sont au nombre de dix, et méritent d’être nommés : Cédric Auffret, Noémie Chicheportiche, Mathilde Fouet, Benjamin Haddad, Leyla Jawad, Azedine Kasri, Mathieu Lardier, Pauline Noziere, Mehdi Ortelsberg et Imad Reddouane. Toutes et tous délivrent une prestation qui prouve qu’une préparation au top, doublée d’un personnage bien écrit, est une condition indispensable à la réussite de n’importe quel film. On est assez impressionné par la qualité de cette brochette, car il faut bien admettre qu’on n’attendait pas le tournage de La règle du jeu aussi abouti sur ce point. Pas un seul ne semble au-dessus ou en-dessous, le résultat homogène force le respect, et on est admiratif de toute cette spontanéité qu’a réussi à capter le réalisateur.
« Si je t’enfonce une olive dans le cul ? »
Si La règle du jeu profite d’un casting aussi convaincant, c’est aussi parce que la mise en scène de Ambroise Carminati a su se ranger derrière l’intérêt du film. Le style très chaud, pris sur le vif, quasiment documentaire, est une évidence, même si l’utiliser tout du long, sans volonté d’un seul plan maniéré, demande un certain courage. On pourra peut-être trouver certains plans un peu trop tremblotants, notamment au début du film, mais le style épouse très bien le propos et le crescendo de La règle du jeu. On est un peu plus sceptique quand à la gestion du son, parfois étrangement saturé, d’autres fois un peu fouillis. Évidemment, on comprend que le but est de coller le plus près possible à l’impression qu’on peut avoir autour d’une table, dans un (plus ou moins) joyeux brouhaha. Mais tout de même, parfois ce choix de ne pas être tout à fait propre dessert certaines répliques, et force un peu trop le spectateur de La règle du jeu à tendre l’oreille. Rien de bien grave, mais on a l’impression de louper certaines phrases, et c’est bien dommage étant donné la qualité des échanges. Comme le film n’est pas encore annoncé pour une sortie cinéma, il se peut que quelques modifications soient effectuées. En parlant des dialogues de La règle du jeu, l’aisance des comédiens est telle qu’on dénombre pas mal de rires bien francs. Notamment grâce à une pizza reine, et sans champignon, qui aura provoqué un véritable fou rire.
Des rires et des regrets.
La règle du jeu fait rire, provoque parfois la gène, et aborde même certains problèmes de société comme le racisme et l’antisémitisme. Ça marche bien, et c’est assez justifié pour ne pas que ça fasse leçon de morale sirupeuse. Seulement, le film finit par souffrir de ce qui fait son intérêt : le concept. On ne peut s’empêcher, lors de la deuxième partie, de penser qu’on est face à un court-métrage qu’on a étiré, certes avec du talent à tous les niveaux, mais tout de même un peu répétitif sur la fin. La faute à un second tour de table un peu décevant de par l’absence de véritables enjeux. Les phrases assassines fusent, d’ailleurs les questions sont souvent remplacées par des affirmations d’une violence bien savoureuse, mais au final on se demande où nous laisse le réalisateur alors que La règle du jeu tire sa révérence. D’ailleurs la toute fin ne réussit pas à être aussi forte qu’espéré, et l’utilisation d’une chanson en guise d’adieu à ces personnages attachants provoque un certain regret. On a la certitude d’avoir passé un bon moment, mais pas assez accompli pour être complètement sous le charme. Malgré cette retenue, La règle du jeu est un divertissement assez intéressant pour qu’on suive de près sa carrière, celle de ses comédiens, celle de Ambroise Carminati, et celle du collectif Et Bim.
La règle du jeu, les bonus.
Visitez le site officiel de La règle du jeu, plein d’idées sympathiques.
La page Makers bankers de La règle du jeu est toujours disponible, et regorge d’informations.
Le site officiel du collectif Et Bim est aussi à découvrir.
- L'ensemble du casting.
- Des répliques savoureuses.
- La fin.
- Mixage audio inégal.