L’Ere du Peuple – Jean-Luc Mélenchon

Critique de L’Ere du Peuple de Jean-Luc Mélenchon

L’Ere du Peuple est le énième livre de Jean-Luc Mélenchon. Si ses qualités de tribun ne sont plus à démontrer, trop peu de gens savent que ce monsieur qui prône une richesse mieux répartie aime écrire des livres. Des livres, bien entendu, sur la politique, la finance (son grand ennemi), qui permettent de densifier un peu plus son assise financière dont le patrimoine est évalué, selon les estimations, aux alentours de 600 000 € (le site de Jean-Luc Mélenchon; Paris-Match; L’Express). Alors au final, que vaut l’Ere du Peuple ?

Contextes de L’Ere du Peuple

Sur fond de révolution citoyenne et de corruption financière, Jean-Luc Mélenchon va droit au but. Que l’on partage ou non ses idées politiques, il faut lui reconnaître cette grande qualité : il ne tourne pas autour du pot. Dans L’Ere du Peuple, on retrouve toutes les caractéristiques qui font sa force, à savoir, attaque frontale, directe, arguments a vau l’eau, et une façon de passer le message plutôt populiste. Plusieurs thèmes sont soulevés dans ce livre. On peut notamment citer l’impérialisme américain, la descente de l’Europe, le complexe de la France face à l’Allemagne, la surpopulation, le défi énergétique, le temps (dans sa globalité), la Russie et la Chine.

L'Ere du Peuple, le livre de Jean-Luc Mélenchon

Premier grand point à soulever, on ne sait pas si l’adversaire (ou les adversaires de Jean-Luc Mélenchon) est (sont) l’Amérique, sa vision financière, le monde financier, la Finance dans son ensemble, le temps de travail en France, l’Allemagne, etc… cependant, il est clair que, si l’on regarde l’ensemble de ces problématiques, l’Ere du Peuple jette un grand pavé dans la marre et le style « Mélenchon » permet de comprendre certaines subtilités économiques qui sont difficilement trouvables.

L’Ere du Peuple et le temps

Une partie du livre m’a fait bondir, il s’agit de l’âge de la retraite. Jean-Luc Mélenchon souligne qu’au temps de Jean Jaurès, l’âge de la retraite était de 65 ans. Après que Nicolas Sarkozy ait changé un peu la donne en modifiant l’âge de la retraite à 62 ans en 2011-2012, Jean-Luc Mélenchon saigne un peu plus François Hollande avec le nouveau recul de la retraite à 66 années. Un peu plus loin dans l’Ere du Peuple, il est marqué « on doit travailler plus longtemps parce qu’on vit plus longtemps » est éclatant de bêtise et « on vit plus longtemps parce qu’on travaille moins longtemps ». Alors, sans aucune prétention, corréler la santé des personnes et l’espérance de vie à la seule réduction du temps de travail (qui n’est pas vrai dans tous les pays) est peut-être un très bel argument populiste, sans doute en partie vrai dans les faits, mais il n’y a aucune preuve. La vérité, et là-dessus j’aimerais avoir l’avis de Jean-Luc Mélenchon, c’est que l’espérance de vie a toujours été corrélée à une autre donnée : les progrès dans le domaine de la santé. Et pour que la santé progresse il faut des chercheurs, des chercheurs qui ne sont quasiment plus recrutés en France, pourquoi ? Est-ce la Finance qui cause également ce problème ? Ou tout simplement un gouvernement qui ne soutient pas assez ses élites intellectuelles et scientifiques ? A ces questions, je vous invite à lire cet excellent article (http://sciences.blogs.liberation.fr/home/2013/06/emploi-scientifique-une-catastrophe-.html ).

Mélenchon tape sur la gauche et sur la droite

Après avoir invité à voter François Hollande, notamment avec la phrase choc «Nous avons décidé de battre Nicolas Sarkozy et pour le faire, nous votons Hollande et nous ne sommes pas gênés de le faire» (http://fr.reuters.com/article/idFRPAE8430EY20120504), maintenant, déçu, il tape dessus. Il s’était donc trompé et retourne légèrement sa veste (même si dans le livre il assume sa part de responsabilité), bien que cet argument puisse facilement être contre-attaqué car il n’était pas pour Hollande, mais contre Sarkozy. A cela, je répondrai une magnifique phrase, tirée d’un film de C. Nolan : « Qui que l’on soit au fond de nous, nous ne sommes jugés que d’après nos actes. ». Si votre acte a été de voter contre Sarkozy, vous avez voté pour quelqu’un d’autre et l’avez donc également soutenu.

L’ère de la surpopulation

Autre problème soulevé, celui de la surpopulation. Là encore, l’Ere du Peuple n’est pas avare en nombres et c’est plaisant à lire et comprendre. Il soulève le problème de la population mondiale qui est croissante, et c’est une vraie donnée qui n’est assez prise en compte par les politiciens. Là-dessus, L’Ere du Peuple arrive à une comparaison entre la France et l’Allemagne et le nombre de nouveaux arrivants sur le marché du travail (750 000 pour la France vs. 280 000 pour l’Allemagne). Question, où est la source ? Si ces nombres semblent plutôt révélateurs dans l’absolu, il est bon de savoir ce qui est sous-entendu par nouvel arrivant sur le marché du travail. Est-ce que cela englobe les nouveaux diplômés ? Quid de ceux qui partent à l’étranger ? Et les chômeurs, sont-ils comptés ? Les immigrés également ? A ce niveau, le livre est un peu vide. Volonté réelle pour ne pas écorcher une partie du lectorat ou erreur flagrante ?

Main tendue vers le peuple écologiste

Un autre point sur lequel l’Ere du Peuple ce montre intéressant, c’est l’écosystème, la biologie, et la Nature. On sent une profonde et réelle envie de la part de son auteur, malgré les nombreuses critiques, de vouloir faire avancer les choses en matière d’écologie et de respect de l’environnement, notamment en plaçant l’Homme devant ce qu’il accomplit et le rend ainsi plus responsable. Ne serait-ce pas un petit appel du pied envers les Verts qui versent leurs vers dans le verre d’Hollande ? Même si cet objectif de ralliement avec le parti écologiste peut sembler farfelu, un mouvement commun aurait un poids non négligeable. De plus, les informations présentées concernant la fonte des eaux sont sans équivoque et montrent que Mélenchon a bien retranscrit un des problèmes majeurs de notre humanité. L’Homme est dangereux pour lui et son environnement.

Le temps de travail en prend également pour son grade dans l’Ere du Peuple

Nouveau point qu’il est nécessaire de soulever, c’est le temps de travail. Selon Jean-Luc Mélenchon, nous sommes soumis à notre temps de travail. Il y a déjà un argument de choc contre ce problème, les salariés de France, s’ils ne sont pas ceux qui travaillent le moins, ils ne sont certainement pas ceux qui travaillent le plus (http://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2014/09/18/la-france-pays-ou-l-on-travaille-le-moins_4489150_4355770.html). Dans le même article, on voit que les travailleurs non-salariés (les patrons, par exemple …) travaillent en moyenne 10H par semaine de plus que les salariés, ce qui fait environ 30 % d’augmentation par rapport eux salariés. Pourrait-on avoir un avis là-dessus ?

Revenons maintenant à cette notion critique de l’Ere du Peuple qu’est la soumission au temps. Nous ne choisissons pas nos horaires. Premièrement, si c’est vrai dans la plupart des entreprises, ce n’est pas le cas partout. En revanche, il faut m’expliquer comment un supermarché peut vendre plus de produits pendant la nuit que pendant la journée ? Si on changeait cet espace de temps dédié aux salariés, les magasins vendraient moins, il y aurait moins de salariés, moins d’emplois, plus de chômage. De même, je vois mal une compagnie d’assurance ouvrir son standard téléphonique à 22 heures pour ses clients. Donc cet argument est loin, selon moi, d’être judicieux. Cependant, il pourrait être bien plus intéressant de ré-ouvrir le débat sur le travail le dimanche. Beaucoup de pays ont des personnes qui travaillent le dimanche et tout se passe bien. Cela crée du gain pour l’entreprise et donc, très potentiellement, des emplois. Cependant, en France, comme il ne faut pas toucher à ce que nous avons déjà et surtout ne pas faire avancer les choses sans effectuer le moindre compromis, on nous sort un argument nauséabond sur le droit du travail et de la famille. Mais imaginez une seule seconde, et je vous prête deux neurones comme dirait Nicolas Sarkozy, que justement, une personne a besoin de toucher un salaire à la place du RSA ou du chômage pour nourrir sa famille ou augmenter ses revenus. Cela ne semble-t-il pas une superbe occasion d’en faire profiter un maximum ?

Une monnaie unique pour l’ère de notre peuple

Dernier point que je souhaite soulever concernant l’Ere du Peuple, c’est celui d’une monnaie unique d’échange avec la Russie ou la Chine afin de détrôner les Américains de leur suprématie. Si l’idée est vraiment intéressante et potentiellement bonne, deux questions se posent instantanément. Ne troque-t-on pas la peste pour Ebola ? Second point, plus tôt dans le livre, il est dit que la France est un peu sous le joug des Etats-Unis et de l’Allemagne pour l’Europe. Mais que je sache, ne pourrait-on pas être sous le joug de la Chine et de la Russie ? D’autant que d’un point de vue humanité et humanisme, ces deux pays sont loin d’être exempts de tout reproche.

Au final, que retenir de l’Ere du Peuple

Pour conclure sur l’Ere du Peuple, si le livre n’est pas excessif en prix (10 €), le contenu et les faits énoncés sont vraiment intéressants et permettent de se poser des questions (environ 150 pages aux Editions Fayard). Les idées ne manquent ni d’audace ni d’arguments, bien que certaines peuvent paraître (parfois) un peu farfelues. Enfin, à la différence du livre de V. Trierweiler, celui-ci propose un très bon niveau littéraire avec à la fois un langage soutenu et un style accrocheur. A lire, pour le plaisir, la culture, pour les partisans, et même les non partisans.

L’Ere du Peuple – Jean-Luc Mélenchon
Un très bon livre qui conviendra aux partisans, aux non-partisans et pour toutes les personnes désireuses d'apprendre des choses
Style
Intérêts
Informations
On aime bien
  • Quelle plume
  • Les connaissances
  • L'argumentation
On aime moins
  • Le manque de références
4.5Note Finale
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