Détroit – Horizons
Chers amis mélomanes, aujourd’hui nous allons parler d’une sortie qui fait des vagues, davantage pour des raisons médiatiques que musicales d’ailleurs. Il s’agit de l’album de Détroit intitulé Horizons. L’entité Détroit ne vous dira probablement rien, mais si je vous dis que l’homme aux commandes est Bertrand Cantat, tout est dit. 12 ans après Des visages, des figures, dernier opus de Noir Désir, que nous a préparé notre sombre héros de l’amer ?
Situons tout d’abord les choses – et sur un plan purement artistique – Bertrand Cantat, c’est le parolier et leader du groupe Noir Désir, qui a survolé le rock hexagonal pendant 15 ans (1986-2001). Un imbécile a dit « le rock français, c’est comme le vin anglais »… Nul doute que le cru de ces bordelais lui aurait fait ravaler ses lunettes, et ses propos. Noir Désir, c’est aussi un retour avorté en novembre 2010, qui a mis fin aux espoirs de toute une communauté de fans. On le place désormais au rang de chimère, à l’image de celui de Téléphone, qui nous fait lambiner depuis déjà 30 ans.
Suite à quelques apparitions en tant que « guest » dans des concerts çà et là, et la collaboration avec Amadou et Maryam, Cantat sort du bois aujourd’hui avec un projet plus personnel. Accompagné de Pascal Hubert, il sort sur la pointe des pieds l’album Horizons sous le nom de l’entité Détroit. Premières impressions…
Ceux qui attendent un ouvrage endiablé et saturé, passez votre chemin. En effet, 666 667 Club et Tostaky sont loin, et Cantat n’a plus Serge Teyssot-Gay pour habiller ses textes de riffs puissants. Cantat lui-même a pris de l’âge, et voyant cinquantaine pointant le bout de son nez, nous sort un album plus intimiste et profond. On pourrait y voir une filiation avec Des visages des figures (2001), qui avait déjà pris cette voie du temps des Noir Dez’. Passé cette demi-surprise, on plonge peu à peu dans l’univers de Cantat. Les mots claquent, résonnent, habilement couchés sur une musique sage et précise. La voix n’a pas pris une ride et les talents d’interprète sont toujours bien présents. Le chanteur est toujours habité et je réalise que 10 ans sans un poète de cet acabit, ça a été un beau gâchis !
Sur le plan musical, plus de Rock, mais de très fortes influences Folk sur bien des titres (Glimmer in your eyes pour ne pas le citer). Epoque oblige, certaines pistes sont agrémentées de beaucoup de sons samplés, pas toujours bien utilisés. En témoigne la reprise – et il faut l’oser ! – de Avec le temps de Léo Ferré, où ils viennent polluer une prestation pourtant très juste du chanteur.
L’album reste malgré tout assez électrique, l’ambiance est lourde (Sa Majesté) et la guitare est au rendez-vous sur des morceaux comme Le creux de ta main. J’ai particulièrement apprécié le titre Horizons, dont l’intro me rappelle énormément Bouquet de nerfs de Noir Désir. On voit que la patte est là, et cela rappelle de bons souvenirs ! Je suis curieux de voir ce que donne le groupe en live, car la scène chez Cantat, c’est dans les gênes.
Personnellement j’ai vraiment apprécié cet album, même s’il ne ravira pas les fans du « Cantat nerveux ». Il demeure un écorché vif, mais a trouvé son style et manie des armes différentes. Un jour en transe, le lendemain ange de désolation, c’est aussi ça Cantat. Mais qu’on se le dise : le grand incendie n’est toujours pas éteint…