Critique – Selfie – Saison 1

Clic-clac, bye bye Selfie

Un thème dans l’air du temps, des acteurs en vogue, un style coloré et pétillant, Selfie est une sitcom qui semble avoir tout pour plaire. Pourtant, Emily Kapnek, la créatrice de la série, a annoncé en novembre dernier son annulation pure et simple par la chaine ABC. Décryptage…

Selfie, aperçu et avis sur les personnages

Selfie raconte l’improbable rencontre entre Eliza Dooley, interprétée par Karen Gillan (vue dans Doctor Who et Les Gardiens de la Galaxie), et Henry Higgs, joué par John Cho (Sulu de Star Trek). Avec près de 300 000 followers toutes plateformes confondues, Eliza est une jeune femme très populaire et déconnectée du monde réel. Après une rupture humiliante l’ayant rendue encore plus « trending » qu’elle ne l’était, elle demande à Henry Higgs, son collègue expert en marketing, de l’aider à redorer son image tout en changeant cette popularité en une expérience positive. En bref, Henry va l’aider à se reconnecter à la réalité, tâche difficile tant le smartphone d’Eliza lui est greffé dans la main.critique Selfie

Avant tout, Selfie est une sitcom, et dans ce sens de comédie de situation (« situation comic »), ça fonctionne. Entre les défis qu’Eliza doit relever pour apprendre à se sociabiliser et les galères rencontrées par Henry, Selfie nous offre de bons gags. On cerne vite les personnages, ce qui permet un rythme efficace dans la réalisation, d’autant plus que les protagonistes sont de parfaits antagonistes. Eliza est la belle jeune femme étourdie et narcissique et Henry est un homme solitaire, bourreau de travail et complétement hermétique au monde des réseaux sociaux. C’est efficace, mais cette caractéristique est à la fois un avantage et un inconvénient. Les personnages sont écrits de manière assez unidimensionnelle. Certes, c’est une sitcom et non pas un long-métrage, mais une fois le décor et les personnages présentés, le spectateur attend rapidement de voir l’ensemble évoluer. Henry va-t-il réussir à remettre Eliza dans le droit chemin ? Va-t-il lui-même s’ouvrir aux tendances modernes ? Jusqu’où ce charmant duo dynamique va-t-il se rapprocher ? Quelques questions qui risquent de rester sans réponse, étant donné que Selfie ne sera pas renouvelée pour une nouvelle saison.

Critique Selfie Karen Gillan John Cho

Selfie, réécriture moderne de grands classiques

L’intrigue de la série Selfie n’est pas totalement une création originale. En effet, il s’agit en fait d’une très libre adaptation, version moderne, d’un classique de la dramaturgie anglaise, Pygmalion. Ecrite par Bernard Shaw en 1914, cette pièce de théâtre met en scène une jeune vendeuse de fleurs, Eliza Doolittle, qui apprend à parler et à se comporter telle une lady auprès de Henry Higgins, professeur de phonétique. Cette histoire s’inspirait déjà de la mythologie grecque, comme son titre l’indique (Pygmalion y était un sculpteur qui tombe amoureux de sa propre création, une magnifique statue d’ivoire). Cette histoire a donc littéralement traversé les siècles. Ainsi, exactement cent ans plus tard, Karen Gillan et John Cho se glissent dans la peau d’Eliza Dooley et Henry Higgs, dont les noms retravaillés montrent clairement que Selfie s’inspire de Pygmalion. Seulement, notre sitcom moderne se heurte à la difficulté dûe au fait que la pièce a déjà été adapté en œuvre audiovisuelle. En 1964 apparaissait sur les écrans My Fair Lady, avec Audrey Hepburn et Rex Harrison dans les rôles-titres, film lui-même adapté de la comédie musicale du même nom, et qui devrait prochainement se voir réadapté au cinéma. Pygmalion n’en est donc pas à son coup d’essai en matière d’adaptation, alors que notre sitcom relève-t-elle le défi ? Malheureusement, pas entièrement. 

Critique Selfie Pygmalion My Fair Lay

Selfie, un défi trop cliché 

Bien que Selfie soit plus une réécriture qu’une adaptation, la sauce à l’américaine ne prend pas. Les gags sont parfois trop lourds pour être vraiment drôles, les personnages trop simplistes pour être crédibles et leurs relations trop catégoriques pour être sincères. On a du mal à y croire totalement. Lorsqu’une scène se veut romantique, elle devient niaise. Lorsque Karen Gillan joue la pin-up sexy, elle frise le vulgaire. Lorsque John Cho feint l’ignorance, il a plutôt l’air simplet. Selfie se situe exactement dans ce que l’on désigne aujourd’hui par le terme de « too much ». L’idée d’une réécriture très modernisée de Pygmalion est très bonne en soi, mais le défi n’est pas relevé. Selfie donne cette impression d’être réalisé à la va-vite, sans doute un peu parce que les épisodes sont courts (20 minutes environ), mais surtout à cause de son écriture. Ce n’est certainement pas bâclé, bien sûr car les créateurs, producteurs et scénaristes ont planché dessus. Pourtant, c’est bien l’impression finale qui en reste. Selfie, une sitcom alléchante mais mal construite qui, en conséquence, se voit être annulée et devient ainsi aussi éphémère que cette mode de l’autoportrait dont elle tire son nom.

Pour d’autres impressions sur Selfie et une review de l’épisode pilote, voici d’autres liens :

http://seriesblog.tv/selfie-critique-reseaux-sociaux/

www.cadebordedepotins.com/2014/08/critiques-series-selfie-saison-1-pilot.html

Critique - Selfie - Saison 1
Selfie souffre de personnages et de situations trop clichés pour être entièrement sympathique. Dommage !
Scénario
Mise en scène
Acteurs
Image et son
On aime
  • L'ambiance légère et colorée
On aime moins
  • Les personnages clichés
  • Les gags trop lourds
2.0La note
Note des lecteurs: (15 Votes)