Retour à Broadchurch pour une deuxième saison, très attendue et pourtant pas prévue au départ. Verdict dans notre critique.
Souvenez-vous. La saison 1 de Broadchurch se concluait avec l’arrestation du meurtrier du jeune Daniel Latimer, qui n’était autre que Joe Miller, père du meilleur ami de Danny et époux d’Ellie Miller, en charge de l’enquête. Plusieurs mois plus tard, on retrouve tous les personnages-clefs de l’enquête, dont évidemment l’inspecteur Alec Hardy, réunis au tribunal pour l’audience préliminaire durant laquelle Joe va plaider non-coupable. S’en suit un long procès où témoins et suspects s’enchaînent à la barre, révélant au passage de nouveaux secrets.
De l’ombre à la lumière
Cette saison 2 de Broadchurch met en scène deux sous-scenarii à la fois, le principal étant le procès de Joe Miller, et le second la reprise de l’affaire Sandbrook, échec majeur d’Alec Hardy (toujours interprété par l’excellent David Tennant).
A notre plus grande surprise, celui-ci avoue à Miller que sa venue à Broadchurch était en fait pour protéger un témoin de l’affaire Sandbrook, Claire Ripley (Eve Myles). Pour ce faire, il demande son aide à Ellie, elle-même dans la tourmente car on l’accuse d’avoir compromis l’enquête Latimer. Sa mission sera de l’aider à protéger Claire car elle est recherchée par son mari Lee Ashworth, principal suspect de l’affaire, mais également de lui soutirer des informations quant à la disparition et au présumé meurtre de deux jeunes filles. Si de manière générale, l’ambiance aussi sombre que dans la saison précédente reste haletante, c’est surtout l’excuse de Hardy quant à sa venue à Broadchurch qui nous coupe le souffle. Cette histoire de protection de témoin fait très « raccrochage aux branches » – faire débarquer Claire de nulle part et ainsi forcer Alec à la protéger aurait largement suffit. Heureusement, ce n’est qu’un détail dans toute cette affaire Sandbrook.
L’enjeu principal de cette saison concerne la conclusion de l’affaire Latimer, dont le verdict repose sur deux nouveaux personnages : les avocates Jocelyn Knight (Charlotte Rampling) pour la partie civile et Sharon Bishop (Marianne Jean-Baptiste) pour la défense, qui forment un duo cinglant. Cette dualité judiciaire cherche à faire la lumière sur le meurtre de Danny, et fait écho aux entraves médiatiques rencontrées par l’équipe de l’inspecteur Hardy lors de la saison 1. Côté mise en scène, certains plans très esthétiques illustrent à merveille ce jeu d’ombres dans lequel s’affrontent les avocates, notamment avec des effets miroirs coupant l’image en deux, avec la partie du reflet plus foncée que l’autre. Évidemment, ce duel juridique ne se déroule pas sans dégâts : au fur et à mesure que les témoins défilent à la barre, les dysfonctionnements de l’enquête font surface et menacent de convaincre le jury de libérer l’accusé, faute de preuves.
Des personnages profondément humains
Dans la même lignée que la première, cette seconde saison de Broadchurch s’intéresse particulièrement aux émotions des personnages, à commencer par la famille Latimer. Beth, la mère, n’arrive pas à faire son deuil malgré l’arrivée d’un nouvel enfant ; Marc, son époux, voit au contraire ce bébé comme une nouvelle chance, lui qui se sent coupable de la mort de son fils. On en apprend également plus sur Alec Hardy, et sur la manière dont l’affaire Sandbrook a affecté sa famille. Mais c’est sans contexte le personnage d’Ellie qui est le plus développé, elle à qui on a retiré la garde de ses fils et qui se retrouve dans le collimateur de la défense. Olivia Colman crève l’écran, notamment lorsqu’Ellie est appelée à la barre face à son époux, dont les avocates tournent les témoignages en sa faveur. L’accusé lui-même n’est jamais montré sous son plus mauvais angle, c’est un meurtrier qui regrette son geste et un lâche qui plaide non coupable pour espérer retrouver sa famille, mais il n’est jamais clairement montré comme un monstre : il ne perd son humanité qu’à travers le discours des habitants de Broadchurch. Les nouveaux personnages sont également très intéressants, surtout le couple de Claire et Lee qui, au long des épisodes, entravent la progression de l’investigation de Sandbrook menée par Hardy et Miller. Cette affaire, effleurée dans la première saison, présente beaucoup de similarités avec celle de Broadchurch, et se révèle être rédemptrice, aussi bien pour Alec que pour Ellie.
Une seconde saison nécessaire ?
A l’origine, Broadchurch était prévue comme une série à saison unique. Au vu de l’immense succès de la saison 1, son créateur et showrunner, Chris Chibnall décide de continuer l’aventure et renouvelle Broadchurch pour une nouvelle saison. Si beaucoup de séries enchaînent les saisons au grand dam des fans qui voient la qualité sombrer, ce n’est absolument pas le cas de Broadchurch car cette seconde saison de huit épisodes n’a rien à envier à la première. De plus, l’offre de séries policières est florissante mais quasiment toutes suivent une même équipe au fil de leurs nombreuses enquêtes. Ici, on assiste à l’ensemble de la procédure à l’encontre du meurtrier de Danny, ce qui reste tout de même inédit comparé aux séries policières standards. La seconde enquête de Sandbrook permet de rythmer et donner du corps au récit qui, tout de même, serait très répétitif puisque le procès reprend point par point ce que l’on a déjà vu dans la saison 1. Sans spoiler, un reproche reste à faire sur la conclusion de cette nouvelle saison de Broadchurch : avec le verdict du procès et la résolution de l’affaire Sandbrook, l’histoire semble enfin être terminée. Pourtant, la chaîne britannique ITV a annoncé pas plus tard que lundi dernier qu’une troisième saison serait prévue. La question se pose : que reste-t-il à raconter ? Réponse l’année prochaine !
Pour d’autres avis sur cette nouvelle saison de Broadchurch, voici la review cash (et avec spoilers) de chez madmoizelle.
- L’envers de l’enquête avec le procès
- La profonde humanité des personnages
- Le duo Hardy / Miller
- L’excuse moyenne pour relancer l’enquête de Sandbrook