Critique – Oriana Fallaci

Critique du film Oriana Fallaci, réalisé par Marco Turco, relatant la vie de la journaliste italienne féministe et gauchiste qui a marqué les médias de la seconde moitié du XXème siècle.

Marco Turco dresse dans le film qui porte son nom, Oriana Fallaci, le portrait d’une journaliste qui a fait le journalisme dans la deuxième moitié du siècle précédent. La journaliste italienne, féministe, passionnée et passionnante, s’est en effet éteinte en 2006, et c’est Vittoria Puccini, une beauté italienne aux yeux clairs surmontés d’un trait d’eye-liner bleu qui enfile son costume de femme dure et déterminée.

Vittoria Puccini dans le rôle de la journaliste Oriana Fallaci

Vittoria Puccini dans le rôle de la journaliste Oriana Fallaci

Une icône du journalisme féministe

Dans ce biopic que le réalisateur a choisi de traiter sous l’angle des souvenirs, filmant en premier lieu la journaliste sur le point de mourir rencontrant une jeune étudiante en journalisme, Lisa, la réflexion sur la cause des femmes est omniprésente. Cela ne pourrait être autrement car cette réflexion est au cœur de l’œuvre journalistique d’Oriana Fallaci, qui a voyagé à travers le monde, du Pakistan à l’Iran en passant par le Viet-Nam, pour écrire sur les femmes. En outre, la réflexion est double car le réalisateur souligne la singularité du personnage dans un milieu encore essentiellement masculin dans la deuxième moitié du XXème siècle. A ce titre, l’expérience vécue et reproduite ici de la guerre du Viet-Nam est très éclairante, tant sur les difficultés à être reporter en zone de guerre qu’à être une femme au sein d’une armée en guerre. Pourtant, c’est son regard de femme qui rend son témoignage d’autant plus émouvant, et notamment à travers le prisme de la maternité, avec les orphelins du Viet-Nam par exemple.

Entre vision singulière de l’Histoire et combat pour la vérité

Son combat de femme va d’ailleurs devenir un combat pour la vérité, l’entraînant à mêler carrière professionnelle et vie privée, de son histoire à Saigon avec François Pelou qui y était correspondant pour France Presse, à sa relation sulfureuse avec Alexandros Panagoulis à Athènes, un poète aux revendications politiques qui l’avaient conduit en prison sous la dictature des colonels grecs. A travers l’histoire d’Oriana Fallaci, c’est donc l’histoire du monde de la seconde moitié du XXème siècle que l’on traverse, ses guerres et ses mouvements, les attentats du 11 septembre 2001 constituant à la fois un choc personnel et un choc mondial. Jamais donc la journaliste ne cessa de s’intéresser au monde, de même que le monde ne cessa pas de s’intéresser à elle, preuve en est avec ce film lumineux et émouvant qui fait suite à une mini-série diffusée en Italie en février, également réalisée par Marco Turco.

Le portrait inspirant d’une journaliste qui osait, parfois un peu trop

Dans le contexte actuel où le religieux tend rapidement à devenir polémique, la radicalité d’Oriana Fallaci, en particulier à l’égard de l’Islam, laisse de marbre. Il faut rappeler qu’alors qu’elle avait obtenu un entretien avec l’ayatollah Khomeini, elle s’était violemment énervée contre ce dernier, arrachant son « tchador », son voile, tout en le qualifiant de moyenâgeux. La journaliste prône au contraire la liberté sexuelle pour toutes, du Pakistan où les jeunes filles sont mariées à quatorze ans sans connaître leur mari et où elles peuvent être répudiées si elles ne leur donnent pas de fils, à l’Iran où une femme ne peut se dévêtir en présence d’un homme autre que son mari. Son combat contre ces diktats religieux, certes controversé, culminera après le 11 septembre lorsqu’elle publiera La Rage et l’Orgueil, un essai dans lequel elle adopte une position très ferme contre l’Islam.

Oriana Fallaci retrace donc le destin d’une journaliste dotée d’un don pour l’écriture mêlé à une envie insatiable de découvrir le monde et de combattre les préjudices. Ce portrait est la preuve, comme elle le montre en sortant sa machine à écrire dans les tranchées de Dak Tô en pleine guerre du Viet-Nam, que la violence des mots peut être parfois plus forte que la violence des combats.

Critique - Oriana Fallaci
A travers ses voyages et ses histoires d'amour, Marco Turco retrace ici le destin d'une femme unique en son genre et d'une journaliste hors pair, Oriana Fallaci.
Acteurs
Mise en scène
Scénario
Image et son
On aime bien
  • Revivre l'histoire du vingtième siècle sous un angle journalistique et personnel
  • Découvrir des paysages baignés dans une lumière éclatante
  • Un destin passionnel raconté avec passion
On aime moins
  • Le mélange d'images d'archive avec le film, parfois flou
4.0L'avis
Note des lecteurs: (2 Votes)
  • Titre : Oriana Fallaci
  • Année de sortie : 2015
  • Style : Drame
  • Réalisateur : Marco Turco
  • Synopsis : Oriana Fallaci raconte la vie à cent à l'heure de cette journaliste italienne hors norme, de la Dolce vita au 11 Septembre en passant par le Vietnam, la Grèce des colonels ou l'Iran de Khomeiny. Oriana Fallaci est impertinente, drôle et parfois brutale. Elle a révolutionné le journalisme, a sillonné la planète et surtout rencontré et bousculé tous ceux qui font l’Histoire.
  • Acteurs principaux : Vittoria Puccini, Vinicio Marchioni, Francesca Agostini
  • Durée : 1h48
  • / Camille LATOUCHE

    Merci pour ce partage. Ici à Pise, j’en avais entendu parlé (Pise est dans la même région que Florence). Un très bon article en tout cas.