Un instant d’histoire du communisme en Estonie, un drame poétique, un professeur d’escrime cherchant sa rédemption. Lumière sur The Fencer, nommé dans la catégorie Meilleur film en langue étrangère pour les Golden Globes 2016 et la liste courte aux Oscars 2016.
The Fencer a manqué de peu la sélection finale pour les Oscars mais se console sur les Golden Globes 2016. Cette collaboration Fino-esto-allemande mérite une couverture médiatique. C’est un long métrage touchant. Il nous montre une facette de l’occupation soviétique et c’est ce que nous présentons dans cette critique.
The Fencer, reconnu mais pas en France
Klaus Härö, le réalisateur finlandais de The Fencer (titre original en finnois : Miekkailija et en estonien : Vehkleja. Il n’y a pour le moment pas de traduction en français. Traduction littérale : L’escrimeur) est habitué aux nominations puisque ses précédents longs métrages, Elina – som om jag inte fanns, Äideistä parhain, ont été nommés ou ont été en liste pour les Golden Globes et Oscars de ces dernières années.
Cette année, The Fencer est présent parmi les 5 finalistes aux Golden Globes et dans la course aux Oscars. Outre ses sélections américaines, le film est présent dans d’autres festivals que je vous invite à consulter ici – liste des nominations du film The Fencer. Cette couverture médiatique relative est néanmoins absente en France pour la simple et bonne raison qu’il n’existe pour le moment pas de traduction officielle et il n’en existera peut-être jamais. Pourtant le film reste intéressant.
Ho Capitaine, mon Capitaine !
En 1952, Endel Neils joué par Märt Avandi, arrive à Haapsalu, une petite ville de l’Estonie soviétique. Il accepte un poste de professeur de sport de l’école du village en dépit d’une légère aversion pour les enfants. Escrimeur professionnel, il commence à former les écoliers à ce sport. Malgré beaucoup de réticence du directeur envers ce sport qu’il trouve « d’un autre âge » – à sous-entendre du Moyen Age, le jeune professeur s’éprend de la passion de l’enseignement au vu des retours très positifs de la communauté et de certains élèves. Cet engouement le fera même participer avec sa classe à un concours d’escrime à Leningrad, le mettant en danger en exposant les raisons de son exil dans la campagne estonienne.
The Fencer est un drame poétique. La première partie du film se concentre sur son personnage principal et le développement de sa personnalité vis-à-vis de la situation. Il est à Haapsalu au début par dépit, puis par choix. Sa classe initialement perçue comme une corvée, se transforme en remake du Cercle des Poètes Disparus. On y retrouve presque le moment phare de ce chef d’œuvre : « Ho Capitaine, mon Capitaine ! ». Deux élèves deviennent miroir, le reflet des actions qu’a l’escrimeur sur les enfants, affectant le développement personnel par des évènements positifs ou négatifs de l’histoire : la petite fille à qui il donne sa médaille de vainqueur sportif au début du film pour lui donner de l’espoir la lui rend quand celui-ci baisse les bras. Ou le jeune garçon qui voit dans l’escrime un exutoire, une alternative aux sombres moments de l’occupation soviétique.
La seconde partie du film est un crescendo de tension à double vitesse. A la fois sur le dénouement de la compétition d’escrime qui ne fait aucun doute tant la mise en scène est explicite, reflétant la détermination du professeur sans laquelle cet achèvement ne serait possible. Et sur la situation propre de l’enseignant qui se fait rattraper par son passé. Ancien soldat, le régime de Staline ne voit pas d’un bon œil de quitter les rangs. La police militaire, aidée par les renseignements du directeur de l’école, retrouve les traces du professeur déserteur.
Peut-être une trop belle histoire
Alors que le film est sous réalisation finlandaise, The Fencer est constitué uniquement d’acteurs estoniens : Märt Avandi dans le rôle principal précédemment cité, mais aussi Ursula Ratasepp qui joue une autre enseignante dont il va évidemment tomber amoureux. On retrouve également Lembit Ulfsak qui tenait le rôle principal dans Tangerines, aussi sélectionné au Golden Globes 2015.
La mise en scène est simple tout comme les décors et les costumes qui, il faut le rappeler, n’étaient pas dans l’exubérance à l’époque. Une surcouche de l’image en post production sur un ton gris et marron contribue à reprendre l’ambiance de ce qu’était l’époque. Mais au-delà de cette belle histoire, mon avis sur le film reste mitigé. D’abord car la mise en scène et les dialogues tirent parfois sur le cliché avec des phrases telles que : « J’ai fui toute ma vie et je suis fatigué de ça » ou « Je ne peux pas laisser tomber les enfants maintenant ! ». Et puis pour un certain côté chevalier blanc sans reproche qui vient sauver les enfants et épouser la jolie demoiselle. Car oui, The Fencer est une histoire vraie : l’école à Haapsalu enseigne toujours l’escrime du fait du passage de ce professeur. Et sur ce point, le film reste une belle histoire. The Fencer reflète à mon avis, assez bien les situations de l’époque avec les coups bas, la délation au Parti et l’ambiance très lourde quand des choix sont à faire. Cette approche est clairement maîtrisée et l’on sent le vécu même dans les acteurs de cette époque difficile.
Nous comprenons les raisons de voir The Fencer dans les sélections des festivals de cinéma. Une mise en scène simple qui porte une belle histoire dans un contexte historique difficile. Une émotion est palpable mais ce qui a peut-être empêché le long métrage de triompher se trouve peut-être dans la légèreté de certains dialogues ou la vision trop belle de cet enseignant.
Si vous voulez en savoir plus sur The Fencer, je vous propose les liens suivants :
http://www.hollywoodreporter.com/review/fencer-miekkailija-helsinki-review-827665
http://variety.com/2015/film/festivals/film-review-the-fencer-1201523547/
- La belle histoire
- L'ambiance présente
- Certains clichés
- Une trop belle image du personnage principal
- Titre : The Fencer
- Année de sortie : 2015
- Style : Drame
- Réalisateur : Klaus Härö
- Synopsis : Un escrimeur fuyant son passé, se retrouve à enseigner dans l'école d'Haapsalu, une petite ville d'Estonie sous occupation soviétique.
- Acteurs principaux : Märt Avandi, Ursula Ratasepp, Lembit Ulfsak
- Durée : 1h 34min